VIE QUOTIDIENNE
LE SPORT
LE FOOTBALL
Le football est, comme sous d’autres latitudes, le sport roi. Jeu d’équipe par excellence, il permet de faire évoluer vingt deux joueurs sur un même terrain sans avoir à dépenser le moindre sou si ce n’est un ballon acheté grâce à quelque donateur généreux. Terrain de fortune tel les « 7 merveilles », le « champ » ou « l’esplanade » qui aura vu défiler tout ce que Bab El Oued a connu d’apprentis footballeurs dont certains figureront au Panthéon du football français, Marcel SALVA et Louis LANDI entre autres. Le football étant avant tout un jeu, les enfants s’emparent de toutes les places, les jardins et les rues pour s’adonner à des rencontres inter quartiers qui valent toutes les coupes du monde, la mauvaise foi et les
Batailles rangées en plus. Ici, les joueurs pratiquent un langage spécifique. On tape des « tchèques » et on évolue avec des « cuissettes » car on ignore, ici, les « ailes de pigeon » et les shorts. La tchèque cette façon peu ordinaire de passer son adversaire direct. Mais pourquoi appelait-on cela une tchèque? tout simplement car l'initiateur de cette feinte s'appelait JERUSALEM joueur d'une équipe juive TCHECOSLOVAQUE réputée qui fit nombre de tournées-exhibitions en terre d'Algérie.
Plus tard, lorsque les automobiles annonceront l’ère moderne, elles prendront bien soin d’éviter certaines rues qui resteront le champ de manœuvre des footballeurs en herbe.
Plus tard, lorsque les automobiles annonceront l’ère moderne, elles prendront bien soin d’éviter certaines rues qui resteront le champ de manœuvre des footballeurs en herbe.
LE SPARDEGNA |
De ces joutes « amicales » naîtront les talents des SALVA, DE VILLENEUVE, IZZO, BUADES, BUFFARD, LANDI, PAPPALARDO, ELKAÏM, SERRANO, TAILLEU, ALMODOVAR, SOLIVERES, MAGLIOZZI etc…………
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Les clubs foisonnent dans le faubourg et si le Sporting Club Algérois, le fameux « SPADEGNA », équipe des porteurs d’espadrilles est le plus célèbre, l’Olympique de Bab El Oued, la Joyeuse Union Algéroise, le Racing Club Nelson des frères ELKAÏM et le Football Club Rochambeau sont les dignes représentants du football de Bab El Oued.
Les clubs foisonnent dans le faubourg et si le Sporting Club Algérois, le fameux « SPADEGNA », équipe des porteurs d’espadrilles est le plus célèbre, l’Olympique de Bab El Oued, la Joyeuse Union Algéroise, le Racing Club Nelson des frères ELKAÏM et le Football Club Rochambeau sont les dignes représentants du football de Bab El Oued.
Le grand Marcel SALVA , sélectionné à 13 reprises en équipe de France, n’oublie jamais de rappeler qu’il fit ses premières armes au F.C. ROCHAMBEAU.
STADE DE SAINT EUGENE |
A.S.S.E |
GALLIA SPORT ALGER |
Le football est prétexte à de mémorables disputes de mauvaise foi entre « supporteurs » mais néanmoins amis, de formations rivales car ici, monsieur, le spectateur « joue » le match avec la même intensité que les footballeurs eux-mêmes. On transpire, on vocifère, on se lève et l’on se rassoit à chaque coup de sifflet de l’arbitre, à chaque tir, à chaque action. Maracana à Bab El Oued vaut le détour. Un Rouennais, militaire invité à la table d’une famille concluait après une rencontre A.S.S.E- S.C.B.A. : » Avec ce public-là, Rouen est champion de France chaque année! »
LE STADE MUNICIPAL |
L’identification à son club s’apparente à un engagement solennel dont on ne peut ni ne doit s’en démarquer sous peine de se voir traiter de « falso » par les purs et durs . Tout cela dans une bonne humeur qui ne se dément jamais.
L’indépendance coupa les ailes de nombreux futurs cracks mais bon sang ne sachant mentir, certains révéleront leur talent au sein de formations métropolitaines professionnelles ou disputant le Championnat de France Amateur. On peut affirmer sans l’ombre d’un doute que le chef de file de cette génération issue du départ fut l’international William AYACHE que PELE lui-même désigna comme le meilleur défenseur de la coupe du monde de Mexico.
LA BOXE
ALBERT YVEL |
LE HAND - BALL
En Algérie, le hand-ball fait figure de parent pauvre coincé entre les autres sports collectifs où le maniement d’une balle ou d’un ballon reste l’argument principal, football, volley-ball et basket-ball.
Comme ses prédécesseurs dans le cœur de la jeunesse, ce sport introduit par les germains dans le concert international, intéresse fortement les enseignants qui voient là un autre moyen de tempérer les ardeurs des élèves, exigeant une telle dépense d’énergie que les cours se passent ensuite dans une plus grande tranquillité.
Les sociétés sportives omnisports prennent le relais, généralisant ce jeu de mains dans toute l’Algérie. Peu d’équipes s’illustrent dans ce sport que dominent les oranais avec les fameux « Spartiates ». Pourtant, si le club « off-limites » de l’A.S.S.E donne du fil à retordre aux champions de l’Ouest algérien, c’est un enfant de Bab El Oued, Serge TIMSIT qui se révèle au sein du Red Star Algérois dont il garde les buts avec la fougue de ses seize ans. Les sélectionneurs de la ligue d’Alger le retiennent à plusieurs reprises mais c’est lors d’un tournoi à Paris qu’il éclabousse de toute sa classe, que les responsables de l’équipe de France le découvrent. Porté en triomphe par ses adversaires du P.U.C, sa carrière semble toute tracée. C’était sans compter avec « les mères de chez nous » qui refusent que leur petit « il aille se geler les castagnettes loin de sa mère, le pauvre, mon fils! ». Exit l’équipe de France en tant que remplaçant du grand FERIGNAC à l’âge de dix sept ans.
SERGE TIMSIT GARDIEN DE LA SELECTION D'ALGER |
L’Algérie regorge d’histoires similaires à celle de Serge TIMSIT, les départs étant subordonnés à l’autorisation des parents et parfois au refus pur et simple de ces enfants du soleil qui rejetèrent l’idée de s’expatrier loin de leur pays. Pourtant, quelques années plus tard..................
LE JUDO
LE S.A.B.O |
Grâce soit rendue à ces preux chevaliers du sport pied noir d’avoir inscrit à tout jamais le nom de Bab El Oued dans le livre d’or du Judo français
LA NATATION
Les rivages méditerranéens d’Algérie figurent parmi les plus beaux sites de la planète. Comment s’étonner alors que la jeunesse du pays réponde si massivement à l’invitation des noces de la mer et du ciel, de la plage et du soleil. Dans la fournaise de l’été, la fraîcheur de l’onde a donné naissance à mille et une vocations sportives.
La natation et les sports nautiques gagnent dans les années 50 leurs lettres de noblesse avec la reconnaissance par la Fédération française de la qualité des nageurs algérois avec la mise en chantier de la piscine olympique d’EL KETTANI où plusieurs records de France et d’Europe passeront de vie à trépas. Les noms d’Héda FROST, d’Alain GOTVALLES et de Jean Pascal CURTILLET demeurent liés à nombre de records de France et d’Europe à la piscine d’EL KETTANI. Ils sont les dignes successeurs des frères BERNARDO.
Alain GOTVALLES attend l’exode et le 10 août 1962 pour battre avec J.P. CURTILLET, GROPAIZ et CHRISTOPHE le record du monde du 4x100 mètres nage libre puis le 13 septembre 1964 pour pulvériser, à Budapest le record du monde individuel du 100 mètres nage libre en réalisant 52’9 contre 53’6 au brésilien DOS SANTOS.
Né en métropole mais de maman Bab El Ouédienne et de père Oranais, Frank ESPOSITO reste le digne représentant de cette natation d’outre-méditerranée qui apporta tant de victoires à l’équipe de France.
LE VOLLEY BALL
Le Volley se joue sur les plages, à Alger comme à Miami, à Bab El Oued comme partout ailleurs. Saison de prédilection de ce « jeu de mains », l’été dure cinq mois sur cette rive de la Méditerranée.
SELECTION D'ALGER |
ALAIN FABIANI |
La plus belle réussite du volley-ball de Bab El Oued et, à travers elle de toute l’Algérie, sans oublier, toutefois, les deux capitaines de l’équipe de France des années 50-60, l’algérois FERRER et l’oranais ARROYO, fut consacrée par la carrière conjuguée des frères FABIANI, enfants du quartier Nelson. Alain, le cadet fut sans conteste le meilleur passeur du monde que s’arrachèrent les clubs les plus riches de la planète, en l’occurrence, les équipes italiennes de Trévise, Pérouse et Parme. Meilleur joueur français de tous les temps, détenteur du record des sélections, Alain FABIANI fit les beaux jours de l’équipe de France dirigée de main de maître par son frère aîné Jean-Marie qui fut un joueur de haut niveau.
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De nombreuses autres disciplines collectives attirèrent ce besoin decommuniquer qui existe dans tout pays méditerranéen où le cloisonnement entre hommes et femmes est bien réel. Mis à part, la boxe, l’haltérophilie, le rugby, le judo et le football, la belle jeunesse féminine de Bab El Oued répondit présent à l’appel des sirènes. Le muscle en moins mais la grâce en plus, le sport féminin connut ses heures de gloire avec Héda FROST ou Jacqueline REES-LEWIS mais la plupart des participantes demeurèrent dans l’anonymat pour défendre les couleurs de leur club avec un esprit de clocher propre aux gens du faubourg. Les filles d’ELECTRA SPORTS, BRIDJA SPORTS, ALGERIA SPORTS, SPORTING et bien d’autres retrouvèrent dans ces joutes amicales un esprit de camaraderie, une complicité fraternelle que la vie avait estompés, pour certaines, depuis les années d’enfance.
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EPILOGUE
Bab El Oued a perdu son âme en perdant ses bâtisseurs. Les pierres, les rues, les avenues, les places, les jardins, les plages lui survivent avec d’autres arguments, d’autres choix, d’autres sentiments. Les murs répercutent d’autres rites, d’autres voix, d’autres dialectes. Le pataouète a coupé le son de ses haut-parleurs et rompu le lien ombilical qui le liait au faubourg. Quant aux cafés devenus maures pour l’éternité, ils ignorent les chansons de Marino MARINI, Los ALCARSON ou Enrico MACIAS.
Les immeubles demeurent muets devant les dégradations dont ils sont les victimes expiatoires du « renouveau ». Les ascenseurs ont déserté les cages, les rampes de bois se sont envolées pour d’autres usages, jusqu’aux boites aux lettres qui pourraient raconter l’histoire de l’Algérie si elles n’avaient résisté à un vent de folie inexplicable qui les a arraché de leur socle.
Bab El Oued manque aux enfants du faubourg exilés qui revoient sans cesse défiler ce décor sublime, jadis invisible à force d’habitude mais devenu si beau à force de solitude. Dans le pays de nostalgie où ils ont posé les valises, ils songent à cette amitié d’enfance, fontaine de jouvence qui désaltérait leur enthousiasme sans en mesurer la prépondérance. Amitié dérobée, senteur familière éventée, lumière tamisée, le nouvel horizon de ces enfants du soleil et de la mer ressemble à une terre aride où ne poussent qu’amertume et regret.
Les familles disloquées par l’exode tentent de reconstituer le puzzle dont chaque morceau rappelle une rue, une place, une maison de Bab El Oued. Le fatalisme oriental qui imprégna l’enfant du faubourg se heurte à la rage, à la colère parfois, à la nostalgie toujours.
Le français de métropole se remémore des pans entiers de son enfance par une simple visite au pays de ses souvenirs. Revoir une rue, une école, un jardin le conduit à entrouvrir le musée d’autrefois. Il lui suffit de prendre sa voiture, le train ou l’avion et il court sur des chemins qui le reconnaissent. Et même si la révélation d’une image dépaysée par la course du temps s’est évaporée, le décor, ce tuteur de la mémoire revisitée, le renvoie inévitablement au passé.
Le pied noir de Bab El Oued ou d’ailleurs, le déraciné aux arbres calcinés, l’orphelin aux pieds nus, se gargarise d’histoires de là-bas, racontées, râbachées, éreintées lors de retrouvailles épisodiques ; ces rencontres, naviguant sur la vague mourante de réminiscences anciennes, s’appuient sur des images servies par des cartes postales jaunissantes.
La plupart de ces naufragés des temps modernes refusent de faire le chemin à l’envers de peur d’abîmer les souvenirs. Alors, ils parlent de là-bas, de Bab El Oued, du pays de leurs jeunes années mais cette vaccination orale contre le fléau de l’oubli ne les dédouanne pas de la pastellisation des images d’autrefois.
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Même délabré, même sali par les immondices qui encombrent les rues, même délabré par le manque d’entretien, Bab El Oued continue d’exister physiquement, géographiquement, historiquement. Mais, traversé par le souvenir d’une France latine, creuset de toutes les influences de Méditerranée orientale, barbouillé de tricolore et de patriotisme, vibrant d’un langage imaginé par ses enfants venus de partout et de nulle part, il voyage en pays de souffrance, orphelin d’Espagne, d’Italie et d’Israël depuis le tragique abandon de juin 62. Terre engloutie par la fureur marine du vent de l’histoire, il allonge la liste des mondes disparus qui s’effacera de la mémoire des hommes au dernier soupir du dernier des survivants pour se perdre à jamais en pays de nostalgérie.
Alors, l’oubli enveloppera de son épaisse fourrure couleur de deuil, la terre natale, la ville natale, le quartier natal : BAB EL OUED
EPILOGUE POUR CEUSSES QUI SONT PAS CONTENTS
Y en a plein que j’ai dû oublier. Que le nom y va me revenir après que le livre il est sorti ! Des endroits, des plages, des quelqu’uns et des quelqu’unes, des instituteurs et des épicières, des balayeurs et des médecins, des avenues et des anisettes.
Que peut-être je me suis trompé de nom même que la honte, déjà, elle me mange la figure.
Pourquoi pas mon quartier, pourquoi pas ma maison, pourquoi pas mon école, pourquoi pas mon café, même pas ya une photo ? Et pourquoi ?
Pace que makache, j’ai trouvé ! La vérité, pas exprès, j’ai fait !
Alors, que tous y me pardonnent pace que si je me rappelle pas tout, c’est que ma mémoire elle a fait tchouffa1 ! Et puis, 18 ans j’avais en juin 62 quand j’ai posé le pied (très noir) sur l’autre trottoir de la Méditerranée, quand l’exodus à l’envers y m’a emmené en pays de nostalgérie.
Mais quand même, quand même, ma parole d’honneur, j’ai tapé un effort surhumain pour emmagasiner tous ces souvenirs dans la tête de babao que j’suis ! Si après toutes mes escuses anticipées, y’en a qui sont encore pas contents, mieux y vont se taper une soupe de fèves ou une olive ! Ou mieux. Qu’y z’écrivent le tome 2.
Cha ! y z’avaient qu’à pas me mettre les yeux ! J’les vois de là, raïeb,les pauvres ! Y vont m’écrire pour qu’on se tape « tête contre tête » dans une entrée de maison ou bien y vont me défier dans une course de carrioles rue Rochambeau ou à la Basséta ! A saoir !
Comme avant, quand on vivait dans notre Bab El Oued qu’il a été le prétexte à ce livre que tout mon cœur de déraciné j’ai mis pour le concocter. Avec tout l’amour que mon quartier y m’a inspiré et que m’ont inspirés tous ceux qui sont plus là pour le lire. C’est pêché ! Yaraslah ! Comme avant quand mes amis même si je voulais pas voir la tête de badjejs qui z’avaient, obligé, je les rencontrais. Comme avant quand sur l’avenue Malakoff, y me prenait la colique pace que mon club, l’A.S.S.E. y rencontrait le Gallia. Comme avant quand je tapais la sieste à l’ombre du rideau de soleil. Comme avant quand j’entendais ma mère chanter au fond de sa cuisine et que je mesurais pas la chance que j’avais. Comme avant quand la solitude elle existait pas, même si on était seul. Comme avant, comme avant, comme avant.........................
Allez va ! même si j’essaie de terminer par une pirouette en pataouète, zarmah je rigole, la nostalgie elle revient au triple galop comme une « smata ». Alors, je range mes stylos , j’écris le mot FIN et je m’enferme en souvenirs de LA-BAS.
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