dimanche 24 mai 2015

extrait de 31 RUE MARENGO de Hubert Zakine


Norbert ne prisait que modestement l’engouement de ses amis pour le football. Richard, quant à lui, avait une dissertation à faire et seuls Kader et José iraient au stade Marcel Cerdan s’entrainer avec l’A.S.P.T.T. Richard projetait déjà de faire son devoir chez la petite mémée. Il joignait ainsi l’utile à l’agréable mais la dissertation allait être bâclée, c’était sûr et certain !Il s’arrêta chez Esther la boulangère, une juive qui se démarquait de Vidal, par ses pains juif et arabe qu’une clientèle friande d’orientalisme réclamait. Calentita, cocas, kesrah, brioche du shabbat, mekrodes, remchets et galettes blanches se partageant les faveurs du public.
Après le repas, il entendit le sifflet de Kader qui se rappelait au bon souvenir de José en train de piquer un roupillon en attendant l’heure de descendre au stade Cerdan. C’était le signal qu’attendait Richard pour aller chez la petite mémée rédiger sa dissertation et s’intéresser de plus près aux lèvres et si possible au décolleté de Bahia. La petite mémée avait l’habitude de se coucher après déjeuner pour une sieste ô combien nécessaire à son âge et par cette chaleur. Richard commença son travail, les yeux rivés sur l’entrée de l’appartement des Mokrani, porte ouverte à l’instar des logis du palier. Le silence de la maison surchauffée ralentissait le pas et le chuchotement était de rigueur dans ces étuves où la seule activité autorisée s’approchait de la sieste organisée. Dans cette atmosphère tamisée, on entendait de temps à autre, le pleur étouffé d’un bébé ou le rire atténué d’une petite fille. Richard avait un mal fou à dompter son esprit rebelle à tout raisonnement. Les aiguilles de la pendule de la cuisine tournaient lentement comme si elles attendaient l’apparition de la jolie Bahia dans l’embrasure de la porte de la salle à manger où Richard s’était installé. La jolie musulmane s’appuya contre l’encadrement de la porte de Richard. Elle se lissait les cheveux et son air coquin l’incita à se diriger vers elle. Alors que rien ne le laissait prévoir, elle lui tendit ses lèvres pour un baiser qui l’éloignait de ses jeux d’enfants habituels. La tête à l’envers, le jeune garçon perdit tout contrôle et voulut aller plus loin mais Bahia le ramena à la raison.
--« N’oublies pas qu’on a tout juste quinze ans ! On a toute la vie pour nous faire des choses ! » 
--« De quelles choses, tu veux parler ? » rétorqua Richard, l’air faussement innocent.
Il était sûr que cette petite dévergondée embrassait mieux que ce qu’il espérait. Ce qui était sûr aussi c’est que la dissertation devrait attendre encore un peu car Richard perdait pied devant les assauts de Bahia. Les mains se cherchaient, les lèvres s’embrassaient et les jeunes corps découvraient le plaisirs des sens. De temps en temps, ils tendaient l’oreille et, drop ninette, ils repartaient pour un tour dans ce voyage pour Cythère qu’ils découvraient avec émerveillement. Ils ne faisaient que s’embrasser et se caresser mais à leur âge, leurs désirs s’arrêtaient à ces jeux d’enfants pubères. Ils en étaient ravis et s’ils ne s’avouaient pas encore leurs sentiments, ils étaient tout proches de l’amour. Richard comprenant très bien que Bahia lui donnerait autant, sinon plus, que les autres filles du lycée, européennes ou musulmanes.

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