Purée, cette journée, ces vacances, j'en ai marre! Le karse y va me pourrir la vie comme ça jusqu'à ma mort ou quoi? Qué j'ai fait au Bon Dieu pour qu'il m'en veuille à ce point. Larchorèche ! Pourtant, j'ai fait tous mes devoirs avant de venir au cabanon. Et aussi, j'ai tapé une année scolaire carabinée même que mon maître il a recompté dix sept mille fois mes notes avant de me féliciter tellement il était surpris. Aouah! Comme il a dit le poète, y'a pas d'amour heureux! Deux filles dans la même journée, je perds! Carmen et Colette. Qui dit mieux! Une corde pour me pendre, voilà c'qui me faut. La pauvre, ma mère! Toute la peine qu'elle va se taper. Et aussi c'est de sa faute! Pourquoi elle a pas donné naissance à un mélange de Robert Taylor et de Steward Granger? Beau et musclé comme un dieu j'aurais été! Ba!Ba!Ba! Toutes les filles j'aurais tombé! Et c'est pas ce petit nageur des Groupes Laïques qui aurait pu jouer dans la cour des seigneurs. Deux calbotes, une botcha et j'aurais emporté Colette sur "La Perle Noire". Ma mère elle aurait pu écrire comme dans le film :
"
Tous mes fils étaient vaillants" ! Tan tan tan!
Total,
elle va écrire :" Mon fils c'est le roi des badjej!
La honte à la figure, y me fait!"
--"Et
comment y s'appelle? Tarzan?" je questionne méchamment.
--"
Bobby!"
Bobby?
Qu'est ce que c'est qu'ce genre? Zarmah,
il est américain! Bobby! Pourquoi pas John Wayne ! Total y doit
s'appeler Antoine ou Raymond! Yen a, j’vous jure !
Luc,
gomme arabique comme pas deux, y rajoute une couche:
--"
Quand c'est qu'on va voir Bobby?" y lance faussement innocent.
--"
Demain le Bon Dieu il est grand!" elle répond sa cousine que,
mon ami, elle a été élevée à bonne école. Parce que les femmes
d'ici, toujours elles lâchaient cette phrase quand elles refusaient
de prendre une décision immédiatement. Les hommes eux, ils
utilisaient cette expression quand la flemme elle les empêchait de
lever le petit doigt. Alors y remettaient au lendemain, au
surlendemain, et même à la saint glin-glin.
Peut-être
que Colette elle meurt d'impatience de revoir ce Bobby de malheur
mais elle feint l'indifférence pour pas que j'me suicide
aujourd'hui. Mainant,
peut-être, mon charme oriental il a déjà fait des ravages. A
saoir!
A peine je me remonte le moral que Colette elle se rétracte pas!
--"
Remarque! On peut y aller cet après midi!"
Elle
souffle le chaud et le froid comme une grande courtisane qui jongle
avec ses prétendants. Purée de comédienne! Toujours est-il que "la
flèche brisée" décochée au moment où je m'attendais le
moins, elle m'atteint en plein cœur. James Stewart même pas y vient
à mon secours. Mais aouah,
seul avec mes tourments, je reste.
Pour
ajouter, y me faut m'encourager à regagner la plage qu'elle me
paraît à des milliers de kilomètres tellement ch'uis mort de
fatigue et d'énervement. Allez va! J'me jette à l'eau comme un sac
de pommes de terre. Je nage à la dégouttée en espérant rencontrer
deux ou trois crocodiles affamés mais à part ceux qui habillent les
polos Lacoste, des bestioles de ce genre y'en a pas bezef
dans
notre Méditerranée. C'est bien ma chance!
Arrivé
sur le sable, je rejoins mon ex-petite chinoise qu'elle a battu le
record du monde établi à l'aller. Enhardi par son sourire qui
ferait fondre toute la Mongolie extérieure (pourquoi extérieure au
fait?) je m'allonge à ses côtés comme Burt Lancaster dans "Tant
qu'il y aura des hommes" sauf que moi je suis une gamate
et que je roule pas un patin à Déborah Kerr. Ni à mon ex-petite
sirène, d'ailleurs.
Derrière
moi, Jeannot et Bernard y sortent de l'eau comme deux morts-vivants.
On dirait qu'ils ont tapé la traversée de l'Atlantique à la nage.
A côté d'eux, j'ai l'air frais comme un gardon. L'air mais pas la
chanson parce que je cache bien mon jeu devant Colette qui croit que
je suis Tarzan alors qu'en dedans je suis perclus de crampes. Mes
jambes elles me portent pour l'amour de Dieu mais heureusement seul
le Bon Dieu il est au courant.
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