lundi 25 novembre 2013

extrait de "OPERATION PLUME SERGENT MAJOR" DE HUBERT ZAKINE

pour le commander : 0603288470

Septembre 1939

A Alger, la mobilisation générale avait vu les hommes de toutes conditions et de tous horizons se regrouper à dans la capitale pour être envoyés vers diverses destinations. Le Maroc, mais surtout la Tunisie et l’Algérie furent des terres de prédilection pour des hommes partis la fleur au fusil, le cœur plein d’espoir ou la peur au ventre.
Richard Atlan, Norbert Bensimon et Pierrot Abergel, les trois enfants du quartier de l'Esplanade se trouvèrent subitement confrontés à la réalité de la vie et non plus à la fiction cinématographique française et américaine que présentaient les écrans des neuf cinémas de Bab El Oued.
Plus question de "Mon Ciné", de "Bijou", de "Palace", de "Marignan" ou de "Majestic"; plus question de côtoyer John Wayne, Humphrey Bogart ou Errol Flynn sur les écrans algérois. Plus question de héros, de bagarres pour de faux, de bombardements sur des décors de carton-pâte. Le temps des larmes et du sang s'était subrepticement glissé dans les jeux de l'enfance.
Le père de Richard Atlan fut mobilisé pour rejoindre le 9e zouave à Aumale. Livrée à elle-même, son épouse se débattit dans un océan de difficultés entre les restrictions et l’absence du chef de famille qui responsabilisa les enfants.
--A présent, tu es le chef de famille, mon fils ! Je te confie la maison. Je compte sur toi pour seconder ta mère. Tu dois la soulager chaque fois qu’elle te le demandera et même si elle te le demande pas, tu dois faire en sorte qu'elle s'use pas la santé. Tu dois te faire obéir par tes frères. Moi, pendant ce temps, je vais gagner la guerre avec tous les hommes d’Algérie! Inch Allah !
--Tu peux compter sur moi, papa mais je te demande une seule chose, c’est de foutre un grand coup de pied « où je pense » à tous ces allemands de malheur !
Si Richard avait osé, il aurait bien précisé "au cul" mais, ces grossièretés étaient bannies du vocabulaire familial. Elles étaient monnaie courante au sein de la rue mais chacun s’essuyait les mauvaises manières sur le paillasson avant d’entrer dans l’appartement et malheur à celui qui dérogeait à la règle. Par respect de la mère et par respect de la famille.
Papa Atlan, comptable à domicile, transfuge de la casbah d'Alger pour les nouveaux quartiers de Bab El Oued, se sentait juif au plus profond de lui mais n’était pas un fervent de la synagogue qu’il fréquentait pourtant lors des quatre fêtes principales de Hanouca, Pourim, Pessah et Yom Kippour. Des appellations hébraïques qu’il n’employait pas à l’instar de nombreux coreligionnaires qui utilisaient volontiers les termes français usités couramment au lendemain de la naissance de l’Alliance israélite universelle en 1860 afin d’emboiter le pas de la France en Algérie.
Ses apparitions aux temples de la rue Suffren et de la rue de Dijon lors des soirs de shabbat avec le but avoué de se faire une clientèle parmi les commerçants juifs de Bab El Oued d’abord puis d’Alger furent couronnées de succès. La famille Atlan de la rue Randon située au cœur de la basse casbah se déplaça à Bab El Oued, dans le quartier de l'Esplanade où elle trouva un appartement spacieux et aéré avec une pièce spéciale pour installer le bureau du maitre de maison.

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