dimanche 8 avril 2012

HORIZONS BLEUS "le cabanon des gens heureux" de Hubert Zakine

Aouah, je vais jouer le bel indifférent.

Pendant que je me perds en conjectures, ma petite chinoise elle est déjà loin. Avec tout ce monde, même plus je la vois. Je veux pas jouer les gamates en lui courant après même si c’est pas l’envie qui me manque. En plus, si je veux la rattraper y me faut battre le record du monde du cinq mille mètres tellement elle marche vite. Jeannot il a assisté à toute la scène. Y joue le conseiller matrimonial :
--« Des filles, y en a une chiée plus quinze ! Une de perdue, trois milles de retrouvées ! » Jeannot, il a le sens de la mesure, ya pas à dire.
--« Regarde Francette, elle te mange des yeux !» il ajoute avec sa gobia habituelle.

Francette, c’est vrai elle est jolie avec ses gros tétés en guise de bouée de sauvetage. Surtout que toujours elle disait à qui voulait l’entendre qu’elle avait le béguin pour moi. Ces filles de Bab El Oued, quand même ! Jamais elles avaient froid aux yeux.

J’apprends qu’elle est chez sa tante à Miramar, une petite plage coincée entre la Pointe et les Horizons Bleus.
--« J’étais sure qu’on allait se rencontrer ! » elle m’avoue avec un sourire qui laisse deviner plein de choses même pour un babao comme moi.

Elle est belle Francette avec ses cheveux blonds, ses yeux noisettes et sa poitrine qu’elle adore mettre en avant des fois que les garçons y seraient larmah.
J’aime ses tétés mais je déteste son prénom. Quelle manie, elles ont les femmes d’Algérie de porter des noms qui se terminent par « ette ». La vérité, Charlette, Colette, Paulette, Lisette, Marinette, Fifinette, j’en passe et des meilleures, c’est pas très stylé.

--« Tu viens, je vais te montrer mon cabanon ! » elle me propose. Je comprends mieux qu’avec un dessin. J’y vais ou je joue les falsos ? Quel dilemme. D’un côté, ma petite chinoise, petit typhon sur Nagasaki qu’elle est partie dieu seul y sait et de l’autre, Francette attirante comme une khémia sur le comptoir de la « Grande Brasserie ». Le salopris qui sommeille en moi y lui répond : « ok ».

La nuit elle se fait noire et moi je suis rouge de confusion. La belle et la bête, à moi Jean Marais ! Les étoiles, le Bon Dieu y les allument les unes après les autres dans le ciel. Comme s’il voulait mieux taper la mata et tout raconter à Colette. Surtout que Francette elle se pend à mon bras en prenant bien soin de se coller à moi.

C’est ma mère qu’elle a raison. « La vie est ainsi faite, aujourd’hui bli-bli, demain cacahuètes ». Une version judéo-arabe de « demain le bon dieu il est grand » ou de « qui vivra, verra ».

Dans la pénombre, les tétés de Francette y paraissent plus gros. Mes mains, elles prient pour résister à la tentation. Purée, ce cabanon, il est caché comme c’est pas possible. Rien qu’on descend vers la mer et l’obscurité. De loin, je mate un recoin qu’il en peut plus de nous attendre. Presqu’y clignote pour nous faire signe. Seulement si je frotte avec Francette, comment je fais demain ? Alors que je me pose trente six mille questions, Francette elle s’est engagée dans le recoin comme si elle l’avait loué pour la soirée. La gobia, elle m’entraine tout au fond là où même le Bon Dieu y perdrait ses savates tellement y fait sombre. Purée, seul le diable y sait ce qui va m’arriver.

Je vois d’ici le débat. Le bon dieu rien qu’il utilise les arguments de la raison :  " Comment, tch’as pas la honte qui te mange la figure" (chof, le bon dieu y parle pataouète !) de faire le dévoyé avec Francette alors que Colette, la bébésso à sa mère, elle est amoureuse de toi. Tu vas lui briser le cœur, salopris que tch’es ! ».
Le diable y lui répond du tac au tac : « La vie elle est courte. Profites mon fils (lui aussi y parle pataouète) Et puis d’où elle va savoir Colette ? »

Purée ! Quel dilemme ! Pendant ce temps y a une sangsue qui se démène comme un beau diable (encore çuilà !) comme une belle diablesse ouais pour me faire perdre la tête. Une frotteuse professionnelle. Tout déshabillé je suis ! Ses tétés, gros comme des cantalous, rien qu’y cherchent mes mains. J’ai beau me dire que je suis un pourri, un moins que rien, un falampo mais aouah Francette elle me tient dans ses griffes.

Je vois que dalle dans l’obscurité mais la vérité qui c’est qu’il a besoin de la lumière! Je comprends le manège de Francette qu’elle aimerait bien jouer aux grands avec moi mais rien qu’ça y manque. Tout c’qu’elle cherche, elle trouve. Je dois être écarlate tellement j’ai honte. Et puis mon ami, elle sait y faire, hein. Y faut dire que l’essence de mes sens, elle carbure soua-soua. La panne elle est pas pour demain c’est moi qui vous l’dis. Je vois, même dans le noir le plus complet où Francette elle veut en venir mais comme sœur Anne, je fais celui qui voit rien venir. Qui serait laouère, bichelaouère, larmah et parote par-dessus le marché. Elle veut m’entraîner sur un territoire indien où j’ai jamais mis le pied. Je suis « le trouillard du far west » style Jerry Lewis et comme Dean Martin y m’a abandonné à mon triste sort, je me vois pas sorti du saloon, enfin de l’auberge, quoi ! Purée moi qui croyais que Colette elle était en avance sur son âge, je m’aperçois que Francette elle court plus vite qu’elle. C’est pas des mains, c’est des tentacules qu’elle a, la pieuvre des Deux Moulins. Elle va arriver à ses fins si elle continue, hein ! Ce sera la fin des haricots ouais ! Purée, le Bon Dieu y va abandonner devant le diable par arrêt de l’arbitre au douzième round. Moi, y a longtemps que mon jeu de jambes il est chlass.

Plus la moindre parcelle de volonté elle habite ma pensée. Mes genoux y joue des castagnettes mieux que la Violétéra et les Madame Bono réunis. Presque j’appelle ma mère et mes tantes au secours.

Soudain, je commence à entendre des voix. Jeanne d’Arc, c’est moi ! Non, c’est les cabanoniers qui rentrent au bercail. Presque je jette mon chapeau de cow boy en l’air si j’en avais un tellement ch’uis content. Comme les visages pâles assaillis par les peaux rouges qui entendent le clairon de la cavalerie. Francette elle me donne un dernier baiser à m’avaler tout entier, et elle se sauve en me laissant tout seul dans l’obscurité. Purée, cette fille, même pas elle m’a calculé. Tu crois qu’elle m’aurait jeté un verre d’eau comme elle fait ma mère quand elle veut revoir un invité dans sa maison?

Je vérifie si dans la précipitation, Francette elle aurait pas emmené quelque chose à moi avec elle. Non, c’est une gobieuse mais pas une voleuse. Je me rhabille la tête à l’envers et je rentre fissa fissa au cabanon des fois qu’elle revient pour achever son travail de sape.
Une fois rendu au cabanon avec plein de mauvais sang dans la tête, à me traiter de vaurien, de vicieux, de sans cœur, que le diable il est dans mon corps comme Gérard Philippe (çuilà qui connaît pas le film, tant pis pour lui) que Colette la pauvre si elle apprend que Francette et moi, on a failli fêter Noël avant le jour de l’an (une variante de Pâques avant les Rameaux) elle va m’assassiner.
La lumière de sa chambre elle est encore allumée. Telle une gamate, je rase les murs. Pire qu’un mari qui rentre chez lui complètement tchitchepoune. Que sa femme elle le guette avec le rouleau à pâtisserie comme dans Pim Pam Poum.
« Demain le bon Dieu, il est grand ! » je me dis en puisant à la source de la fatalité orientale qui m’arrange bien sur ce coup là. Et je me couche la tête pleine d’étoiles et de mauvais sang.

A SUIVRE...................

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