mardi 19 avril 2011

LE RUA PAR MAURICE FAGLIN

LE TEMPS DES VICTOIRES
Nous avons vu, tout au début de ce récit ce qu'était le RUA, club omnisport, en 1931 - 1932.
Pour ce qui concerne le football, il faut revenir à l'été de 1930, alors que nous venions de sauvegarder notre place en Division d'Honneur, en battant l'équipe de Fort de l'Eau.
Nous retrouvons donc nos footballeurs en septembre 1930. Le jeu de l'ascenceur semblait terminé. Car ils jouaient bien nos garçons "scientifique" comme on disait alors. Mais les "autres", nos adversaires, peut-être moins brillants dans la forme, étaient plus réalistes et gagnaient toujours. C'était le temps des victoires morales.
Et en juin 1931, une fois de plus, une fois de trop, il fallait affronter la difficile et aléatoire épreuve des barrages contre Fort de l'Eau, l'U.S.F.E., décidément notre adversaire préféré. Le RUA s'en tira bien et sauvegardait sa place.
Mais patatras ! En septembre 1931, 3 mois plus tard donc, pour une histoire de déclassement de Fort de l'Eau au profit de l'A.S. Castiglione, il fallut, contre cette dernière équipe, rejouer les barrages. Et le mois de septembre, pour une équipe universitaire est une période difficile, la rentrée ne s'effectuant qu'après les vacances de la Toussaint. La 1ère rencontre des barrages fut perdue par 3 à 1, la deuxième gagnée par 1 à 0 grâce à un pénalty providentiel et contesté, peut être contestable, la troisième enfin se termina par une assez facile victoire du RUA par 3 à 1. Précisons pour la petite histoire, que le pénalty de la deuxième manche fut marqué par Roger GOUIN, le spécialiste de l'époque.
Moribond en septembre, notre RUA, allait durant sept mois, de décembre 1931 à mai 1932, ne plusconnaître la moindre défaite et réussir un exploit peu ordinaire : gagner la Coupe de l'Afrique du Nord en mai 1932.
Que s'était-il donc passé ? Le 6 décembre 1931, le RUA, qui se traînait à la dernière ou avant dernière place, recevait au stade municipal, l'A.S. Boufarik, l'une des meilleures équipes de l'époque. Deux événements intervenaient ce dimanche là. Joséphine BAKER, célèbre vedette internationale de music-hall, notre marraine, donnait le coup d'envoi et dans nos buts apparaissait Maurice COTTENET, 18 fois international, qui venait d'être engagé comme entraîneur-joueur. Il est utile de rappeler la composition du RUA ce jour là : COTTENET - COUARD Raymond - BEN BOUALI - FERRERO - DUMAS - DELESSERT - AYELLO - BIANCARDINI - COUARD Roger - GOUIN - BRANCA. Eh bien ! Cette équipé battait Boufarik par 1 à 0 et ce fut le déclic.
En 7 mois donc, non seulement la Coupe de l'Afrique du Nord allait être gagnée , mais en plus le championnat d'Alger était raté d'un cheveu, d'un point si vous préférez. Et ce point tint à un geste, oh combien chevaleresque, de COTTENET.
En effet, tout à la fin du championnat si mal commencé, il s'agissait, croyons nous, de la dernière journée, nous devions rencontrer le Gallia qui nous précédait d'un tout petit point. Il fallait donc que le RUA l'emporte,
un match nul suffisant au Gallia. Et le RUA, à 5 minutes de la fin menait par 1 à 0 quand le Gallia bénéficia d'un pénalty. L'ailier droit du Gallia, AZAM fut chargé du tir. COTTENET détourna de façon imperceptible le ballon, qui toucha la barre, revint en jeu. AZAM, le reprenant, l'envoya dans le but. L'arbitre refusa le but, pensant que COTTENET n'avait pas touché le 1er tir. Le Gallia protesta avec véhémence, l'arbitre consulta alors COTTENET qui reconnut la chose. Le but fut validé, le Gallia fut champion. Mais le vainqueur c'était COTTENET!
Parallèlement au championnat se déroulait la Coupe de l'Afrique du.Nord. D'abord, au cours d'éliminatoires départementales à Alger Constantine, Oran, au Maroc et en Tunisie, ce qui désignait 15 clubs auxquels s'ajoutait le vainqueur de l'année précédente. Les 16 ainsi qualifiés, s'affrontaient alors en 1/8,1/4,1/ 2 finales et finale.
Le RUA, en raison des barrages qu'il avait dû rejouer en septembre, avait accumulé pas mal de retard.
Il joua sa 1ère rencontre contre le F.C.Blida qu'il battit, puis la 2e contre le Gallia, au stade de Saint-Eugène, terrain neutre. Le stade était plein, de gallistes surtout, de ruaïstes aussi car le succès appelant le succès, les supporters bleu et blanc se faisaient de plus en plus nombreux. Ce match connut des incidents graves. En effet, alors que le RUA menait par 1 à 0 et qu'il dominait largement son adversaire, ce dernier, ou plutôt ses supporters à la suite d'une décision de l'arbitre, envahirent le terrain. Ils étaient plus nombreux que ceux du RUA, plus décidés aussi.
Mais ceux du RUA, d'habitude fort courtois, comprirent lorsque le match fut définitivement arrêté, que leurs favoris, une fois encore, allaient être privés d'une victoire amplement méritée. Ils envahirent à leur tour le terrain, brisèrent les chaises amenées des tribunes, en firent un tas énorme au centre du stade et y mirent le feu. Pompiers, policiers engagèrent alors un nouveau match contre le feu et les envahisseurs. On devait dire - on dit encore - que le turbulent Claude TAILLAN, titulaire de notre équipe fanion, à l'époque suspendu pour propos inconvenants, à l'égard d'un éminent dirigeant de la ligue de football, avait été l'un des instigateurs de l'incendie. On l'accusa aussi d'avoir assommé un commissaire de police d'un coup de chaise. Il y avait tellement de monde n'est-ce-pas ? Ce qui est sûr c'est que le dit commissaire perdit son képi et sa connaissance au cours de la bousculade.
POUR LA PETITE HISTOIRE, A LA SUITE DE CES INCIDENTS, LA MAIRIE DE SAINT EUGENE DECIDA DE CONSTRUIRE LES TRIBUNES EN DUR QUE TOUS LES AMATEURS DE FOOTBALL CONNURENT JUSQU'A L'INDEPENDANCE.
C'est à Tunis contre l'U.S. TUNIS que se joua le 1/4 de finale, le 6 mars 1932 par un temps épouvantable, devant une foule considérable.
Le RUA alignait COTTENET - COUARD - BEN BOUALI - DELESSERT -PATAA - DUMAS - BRANCA -MARIE - COUARD - GOUIN - LUCCHINI.
C'était la composition type que COTTENET avait mis sur pied après quelques tâtonnements. A la mi-temps
le RUA menait par 1 à 0. Mais Raymond COUARD fut expulsé et l'U.S. TUNIS marqua 2 buts. A dix
contre onze cela se présentait plutôt mal. C'est alors que COTTENET qui ne manquait pas d'idées, poussa ses 9 coéquipiers vers l'avant, se plantant aux 18 mètres et même au delà. Roger COUARD évidemment, marqua 2 buts en 10 minutes et le RUA se voyait qualifié pour les 1/2 finales après avoir frôlé la correctionnelle, d'autant plus que l'U.S. TUNIS avait raté un penalty alors qu'elle menait au score. Ouf ! !
C'est l'A.G.S. MASCARA (l'Avant Garde Sportive) que nous devions affronter en 1/2 finale le 5 mai 1932 sur le stade du Caroubier, le Municipal étant indisponible. C'était le stade du Gallia, situé à Hussein Dey,qu'on appelait aussi stade le la Côte Rouge. Par 3 à 1, sans trop de difficultés, le RUA se qualifiait pour la finale jouée le 19 mai au stade Municipal contre l'U.S. MAROC. Les marocains, forts de quelques vedettes : ZATELLI - ORTIN - LAPORTE - JANIN - GONZALES étaient redoutables grâce, entre autres, à de remarquables qualités athlétiques. C'est d'ailleurs ZATELLI qui marqua le 1er but. Mais le RUA prenait peu à peu le dessus et, à quelques secondes de la mi-temps, sur corner que tirait LUCCHINI, BRANCA égalisait. En 2e mi-temps nos 3 milieux de terrain - on disait alors demi droit, demi centre, demi gauche - DELESSERT - DUMAS - PATAA, devenaient les maîtres de l'entrejeu et c'est tout à fait logiquement que l'inévitable Roger COUARD marquait le 2e but d'un maître tir sur passe de BRANCA. Roger " Gégé " GOUIN, malade, c'est TAZAIRT qui le remplaçait dans l'équipe habituelle c'est à dire : COTTENET - COUARD - BENBOUALI - DELESSERT - PATAA -DUMAS - BRANCA - MARIE - COUARD - TAZAIRT - LUCCHINI.
Quant à l'U.S. MAROC elle présentait: GONZALES - CALMELS - GARCIA - TROGNA - ORTIN - MESQUIDA - JANIN - TREMBO -ZATELLI - LAPORTE - BENCIVENGO ou MESQUIDA.
La formation du RUA presque inamovible, subissait au cours de chaque rencontre, une modification dont, aujourd'hui encore, nous ne saisissons pas la raison. PATAA et DUMAS nos 2 1/2 centre et gauche changeaient de place. Peut-être s'agissait-il d'un rite superstitieux ? Roger COUARD prétend que DUMAS avait besoin d'un long échauffement avant d'occuper la partie gauche de notre milieu. Il nous faut ici ouvrir une parenthèse à propos des embûches que le RUA dut éviter à la suite d'affaires que des "amis qui nous voulaient du bien", sans doute jaloux de notre gloire naissante, avaient montées avec une mauvaise foi totale. D'abord les qualifications contestées de COTTENET et de PATAA dont le RUA se sortit assez facilement. Mais la 3e affaire fut autrement difficile à régler. Il s'agissait tout simplement du fameux match RUA-GALLIA non terminé, qu'il fallut rejouer alors que le RUA était déjà qualifié pour les 1/2 finales. Cette nouvelle rencontre, nous faillimes la perdre, puisque, à 5 minutes de la fin, le Gallia menait par 1 à 0. Fort heureusement, AYELLO eut la bonne idée d'égaliser ce qui permit au RUA de jouer les prolongations et de marquer deux nouveaux buts. Nôtre place en 1/2 finale se trouvait ainsi sauvegardée. Pour la petite histoire, il faut préciser que cette rencontre fut rejouée le 10 avril 1932, c'est à dire près de 6 mois après la 1ère !
A SUIVRE.......

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