mardi 23 novembre 2010

ORAN /MIREILLE ATTIAS/ 3

Mais à Oran, la vie politique est aussi conditionnée par les journaux et, si le "Petit Oranais" a eu un certain temps un impact certain sur une partie de la population, "L'Echo d'Oran" fut le journal le plus important. C'est le plus ancien et le plus diffusé : 80 000 exemplaires en 1936, 93 500 en 1938 et 120 000 dans les années 60. Il cessera d'exister en 1963. Fondé en 1844 - le numéro 0 est du samedi 5 octobre 1844 - par Adolphe Perrier, un imprimeur lorrain banni par Louis-Philippe pour avoir exprimé des sentiments trop républicains, ce journal paraissait tous les samedis et se qualifiait "d'organe d'annonces judiciaires, administratives et commerciales" .

Il affiche entre les deux guerres les opinions d'une droite modérée. A partir de 1945, il est dirigé par Pierre Laffont, arrière petit-fils du fondateur. Né en 1913, député en 1958, c'est un libéral modéré. L'Echo d'Oran est le journal des européens et des musulmans acquis aux européens.

LES TRADITIONS


Dans les vieux quartiers de la Marine, à la saison chaude, si les chaussées et les magasins sont déserts aux longues heures de la méridienne, les chaises occupent les trottoirs dès la tombée de la nuit. On va prendre le frais sur les falaises bordées de palmiers du front de mer.

Mais c'est à Pâques et à l'Ascension que la fiesta prend tout son sens.
"La Mouna" est surtout la fête du printemps et l'exode du citadin vers les rares coins de verdure des environs ; la source Noiseux pour les piétons, les pinèdes de Canastel, de la Montagne des Lions ou M'sila pour les motorisés. Pour les chrétiens, c'est le moment d'honorer la Vierge de Misserghin. Plus qu'un gros village,; Misserghin est une immense jardin d'orangers. C'est le berceau de la clémentine, cette variété de mandarine à la peau plus fine et plus rouge et à la chair ferme et sucrée. C'est là que l'abbé Clément la créa à la suite de longues recherches et de greffes heureuses de bigaradiers. Et, au bout d'un ravin embaumé par les fragrances des agrumes en fleurs, s'ouvre une grotte, reproduction de celle de Lourdes, avec ses béquilles, ses corsets orthopédiques et d'autres vestiges de miraculés reconnaissants.

Le plat du jour est, soit le riz à l'espagnole, soit le "gaspacho", qui est un épais et succulent ragoût de porc, de gibier ou de volaille servi sur une immense fougasse ou "coca" . C'est au dessert qu'apparaît l'événement tant attendu : la "Mouna", pâtisserie briochée surmontée d'oeufs coloriés.

L'origine de cette Mouna est peu connue : Au 16ème siècle, les rois d'Espagne envoyaient dans leurs présidios africains (Ceuta, Malilla ou Oran) ceux de leurs courtisans qui s'étaient rendus indésirables à l'Escurial. Ces présidios ou places fortes avaient leur Bastille . Celle d'Oran se trouvait sur un pennon rocheux, à cheval sur la rade de Mers El Kébir . Parce que les singes ("monos" en espagnol) y étaient aussi nombreux qu'à Gibraltar, cette roche et la forteresse qui s'y dressait portait le nom de la mona. Ce fut ensuite le fort Lamoune, siège de l'Amirauté jusqu'en 1962. Une seule fois l'an, le dimanche de Pâques après la communion, les déportés avaient le droit d'apercevoir leurs famille qui résidaient tout près de là, dans le quartier de la Blanca, en bordure de l'enceinte de la casbah.

Les parents se réunissaient au pied des murs et faisaient passer aux prisonniers, au bout de longues perches, un gros gâteau préparé pour la circonstance et que depuis on continue à appeler la "Mouna".

En échange, les prisonniers embastillés faisaient descendre des plaques de tôle sur lesquelles ils avaient fait cuire une purée de farine de pois chiches, leur maigre pitance toute l'année. Cette espèce de flan de prisonnier devait se manger très chaud car il durcissait en refroidissant . On l'appelait la "calentica" (de "caliente" chaud, en espagnol). La calentica, vendue par des marchands ambulants, est restée longtemps le plat du pauvre.

Le jeudi de l'Ascension, les catholiques honoraient la vierge de Santa Cruz. Cette vierge a une histoire : En 1849, la population, alarmée par une longue période de sécheresse et une épidémie de choléra, adresse une supplique au général Pelissier commandant la Garnison. Chacun pensait en effet, que seule une forte pluie pouvait les débarrasser de la maladie. Dans le village nègre, un taureau avait été sacrifié dans le tintamarre agaçant des castagnettes et le tam-tam assourdissant des tambourins. Mais le ciel restait obstinément clair.

C'est alors que les Espagnols proposèrent de monter nu-pieds, sur les genoux pour les plus courageux, jusqu'au château fort que le marquis de Santa Cruz avait fait bâtir tout au sommet du djebel Murdjadjo. Avec la bénédiction bourrue du général Pelissier, les pèlerins escaladèrent les flancs arides de la colline dominant le petit port de la Calère, portant sur leurs robustes épaules une statue de la Vierge qui fut déposée au pied du fort, à l'endroit ou un promontoire rocheux permet d'embrasser un magnifique panorama.

La plaque commémorative signale : "dédiée à la vierge Notre Dame du Salut après l'épidémie de choléra de 1849. Inauguration le 9 mai 1850 par Monseigneur Pavy, évêque d'Alger. La statue a été mise en place sur la tour le 6 décembre 1873."

Des cierges brûlèrent par centaines, des prières furent dites à l'intention de Notre Dame de Santa Cruz et le lendemain, la pluie tomba. Telle est la légende qui est à l'origine de la patronne des Oranais qui lui dédièrent une chapelle, puis une basilique, inaugurée en 1950 par le cardinal Roncalli, le futur Jean XXIII.

Repliés en métropole, les Oranais n'eurent qu'une pensée : Faire revenir leur protectrice auprès d'eux. Et, tandis que le Monument aux Morts d'Oran était transféré à Lyon, quartier de la Duchère (Avenue Balmont), Notre Dame de Santa Cruz recevait l'hospitalité de l'humble église de Courbessac, près de Nîmes.

1 commentaire:

  1. c'est un blog intéressant ,pour l'histoire de notre ville d'Oran Algérie et même Universel.
    voir ce blog svp.
    http://naimawahrania.blogspot.com/

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