vendredi 13 août 2010

Le Yaourt et la question juive

Tout a commencé en Espagne, en 1492, quand les très catholiques mais peu avisés rois, Isabelle et Ferdinand, expulsèrent de leur pays leurs plus futés et fidèles sujets. La famille Karasu, comme quelques centaines de milliers de leurs coreligionnaires, prirent le chemin de l'exil. Après quelques siècles d'errements dans le bassin méditerranéen, ils finirent par échouer dans les Balkans, dans la ville de Salonique, alors sous domination turque.
Isaac Carasso - il avait quelque peu trafiqué son nom - Docteur en médecine de son état, remarqua que ses patients souffrant de maux d'estomac, guérissaient en absorbant des yaourts; en bon juif, donc en "sale capitaliste", il fonda une petite entreprise qui fabriquait des yaourts.



En parallèle, Ilya Ilyich Metchnikov, zoologiste, anatomiste et bactériologiste, qui travaillait à Odessa sur le vaccin contre la rage, en eut ras le bol de l'hostilité dont il était l'objet en Russie; il faut préciser que ce savant se prénommait en fait Elie et non Ilya. Copain avec Pasteur, il lui demanda un poste à l'Institut du  même nom. Il émigra donc à Paris, devint vice directeur de l'Institut  Pasteur, et au passage, décrocha en 1908 le prix Nobel de Médecine  pour ses travaux sur la phagocytose. Elie travaillait aussi sur les
ferments lactiques; convaincu que le lait caillé, le yaourt et le  Kéfir, prolongeait la vie.

Isaac Carroso exploita les découvertes d'Elie Metchnikov et se mit à fabriquer les yaourts qui créent des centenaires. En 1918 La famille d'Isaac Carasso, comme pratiquement tous les juifs, qui y formaient une communauté florissante, quitte Salonique, six ans après la prise de la ville par l'armée grecque, qui, en passant, transforme le nom de Thessalonique en Salonique et immigre… en Espagne ; retour aux sources !
Il y fonde une petite entreprise destinée à produire des yaourts et des centenaires.
Isaac a un fils qui s'appelle Daniel. Le petit garçon a bien sûr un diminutif affectueux, comme seuls savent donner les juifs. En catalan, ce diminutif est Danonn, qui signifie "petit Dan".
Le papa Isaac décide donc d'appeler son entreprise de yaourts : Danon.
Daniel reprend l'affaire de son père, mais la guerre le contraint à se refugier aux États-Unis. En 1941 il rencontre à New York un certain docteur Herman Baruch qui, persuadé que le yaourt est merveilleux pour la santé, propose à Daniel de s'associer avec lui, avec comme objectif : apprendre aux Américains à mieux se. nourrir. Le jeune Daniel complètement fauché, qui ne possède qu'un savoir faire en matière de  yaourts, reçoit donc 50 % des parts de "Dannon Milk Products" et en devient le président.



Et c'est là qu'intervient la cerise sur le gâteau : Baruch fait rencontrer à Daniel Carosso le plus grand designer du siècle qui s'appelle, vous l'avez deviné, Raymond Loewy. "Danon, le nom ne va pas du tout, les Américains vont prononcer Dénoni." leur dit Loewy.
Sur une grande feuille de papier, il écrit «Dannon» en appuyant sur le «a» et en supprimant le «e». Puis il dessine un logo en ajoutant «real yoghurt», et en plus, il ne demande pas un sou pour son travail.



 La suite vous la connaissez, Antoine Riboud , l’industriel ( pas un métier pour un juif, comme rabbin), entre en piste. BSN et DANONE fusionnent, et aujourd'hui 80 millions de pots de Danone sont vendus chaque jour à travers le monde. Mais tout cela aurait-il été possible si quatre immigrés moldaves ou espagnols ou ce que vous voudrez : Isaac, Elie, Hermann et Loewy, expulsés d'Espagne, de Pologne, de Moldavie ou d'ailleurs, n'avaient un jour rêvé de transformer les hommes en centenaires.
Rappelons que Daniel Carosso "petit Dan" a aujourd'hui 103 ans, bon pied, bon œil. Décidément le génie juif et le yaourt, ça conserve.


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