lundi 19 août 2019

UNE ROSE D’ALGERIE de CHARLES BACCOUCHE

 
 
UNE ROSE  D’ALGERIE
 
                   de  
 
         CHARLES BACCOUCHE
 
 
HEUREUX QUI COMME
L’Algérie de notre enfance était un pays de roses de fleurs, de parfums et de lumière.
La Rose embaumant l’air de notre enfance jamais ne s’est flétrie, mais jamais non plus, nous n’avons retrouvé la clarté de nos amours de 15 ans, jamais non plus, nous ne les avons oubliés, Ils nous accompagnent à tous les âges de notre vie, nous les avons cherchés dans nos rencontres et parfois nous en avons aperçu la lueur.
Ce sont des mémoires de joie sans nostalgie et sans regrets que nos amours d’enfance.
Ils accompagnent les rêves qui deviennent prémonitoires nous annonçant de belles journées de réussites de nos entreprises, ils sont aussi la source des espoirs souvent déçus de grandes personnes que nous sommes devenus,
Nous d’Algérie, dont notre présence précède celle de tous les autres, nous les contemporains des Numides, des Carthaginois, des berbères, des Vandales, des Romains des Arabes, des Turcs, ne savions pas que nous étions en exil, nous étions seulement heureux, sous le grand soleil d’Afrique et de son ciel sans limites, noyé dans ses bleus intenses et ses nuits enchâssées d’étoiles sans nombre.
C’est l’expulsion soudaine désordonnée, impitoyable de nos communautés poussées hors de leurs maisons, hors de leurs rues, de leur villes, de leurs villages, de leurs campagnes, de leurs vies en fait, par les haines du monde et de la guerre des hommes, cet outrage qui nous inculqua sur le sol de France (notre patrie)  que nous étions en exil depuis deux mille ans, que l’Algérie ne fut qu’une étape et pas le havre paisible de notre destinée.
Bref, nous rejoignions le peuple banni de sa terre, dispersé aux quatre vents, qui adopte les lois et les coutumes des pays d’accueil sans jamais renoncer aux siennes, sans se mélanger complètement, avec la prétention insensée il faut en convenir, d’être un vieux peuple détenteur d’un livre transcendant proposant au Monde de vivre dans la Justice entre les Nations et d’instaurer la paix entre les hommes.
Malgré les avertissements, les admonestations, les appels à la raison de faire comme les autres, les invitations de croire aux dieux de passage, de respirer l’air du temps, d’être grec au temps des grecs, d’être romains au temps des romains, d’être chrétiens au temps des de la Croix et musulmans au temps du Croissant, ils ne renoncèrent jamais ces fous de la mémoire à proclamer l’Unité divine et la grandeur de la Loi.
Un peuple prophétique ne peut être admis parmi les Hommes. Malgré les condamnations les sanctions les expulsions, les conversions forcées, les massacres, ils persévérèrent seuls et méprisés, dans la foi et de leurs pères et leur fidélité au message du Sinaï.
Les communautés d’Algérie avaient rejoint leur peuple
Mais la rose, la fleur reine de l’Algérie jamais ne s’est fanée. Elle accompagne nos chemins depuis les monuments d’Alger la blanche jusqu’aux statues de Paris, de Marseille et d’ailleurs.
Elle se déploie dans les replis des nuits et les volutes des matins ombreux, elle chante en nos cœurs les chants de l’espérance, et nous dit que le malheur ne gagne pas toujours et que la vie a un sens.
Elle nous murmure la légèreté de l’air des hautes plaines, et les senteurs de la forêt des Aurès au pays des Chaouias, la clarté des Atlas tellien et saharien, l’austère Kabylie, celle de Tizi Ouzou et celle Bougie, la générosité et des plaines de la Mitidja, les mystères à l’entrée du désert, du pays des Mozabites, avant le profond Sahara des chotts et des hommes bleus.
Elle se fait Souvenance des toits brillants de ce pays de lumière dans l’air éthéré, du soleil de onze heures pimpant et pointu, des chaleurs vibrantes les jours de sirocco et la froideur des hivers des hauts plateaux, des soirs embrasés et des nuits rafraichies.
Les enfants de tout temps et ceux d’Algérie aussi, connaissent le secret des roses éternelles, des jardins de fleurs répandues au détour des sentiers secrets, ils gardent pour eux les buissons protégeant insectes et jeunes pousses, ils passent sans émoi devant les ruines de la Rome impériale qui partout en Algérie, jonchent ses espaces.
Elle était belle dans sa robe blanche, souriante et lointaine, la jeune fille, à l’enfant qui n’en revenait pas de la sidérante proximité. Jamais il n’aurait pensé que son cœur ne cesserait plus de battre à sa vue ou à sa pensée, qu’elle peuplerait pour toujours ses rêves pour le consoler ou lui annoncer de belle choses.
La jeune fille, elle, rêvait au prince charmant comme toutes les jeunes filles, s’habillaient de blancs et de rires complices lançant adroitement leurs regards vers les garçons de leur âge.
Si pour les unes et les autres, leurs rêves ne se rencontraient pas ils se côtoyaient et cela suffisait à les rendre heureux.
Cet émoi est demeuré intact, ni le temps qui passe, ni les exils, ne l’ont flétri.
La rose d’Algérie avait une sœur qui poussait dans les immensités sahariennes, la rose des sables. Il n’est pas opportun de rapprocher ces deux roses, car la Rose rouge qui s’ouvre chaque jour dans les cœurs de ceux de là-bas, leur confie qu’ils savent les rues de Constantine, la cité des vertiges, les odeurs d’Oran la maritime, Bône la fière, au cimetière si séduisant, les plages brûlantes  devant la mer mouvante, les grottes merveilleuses d’une côte plus belle encore que la côte d’azur de la corniche des Maures et de l’Esterel, ou que la  riviera de la belle Italie.
Amnésiques des misères anciennes, ils se souviennent des émanations des roses d’antan, portant chacun, la sienne au creux de son âme, ils en ont apporté de l’Algérie heureuse, la gaité et la joie sur la terre de France.

 
Ils ont construit et reconstruit leurs familles, leurs maisonsleurs cités ; leurs enfants et leurs héritages au sein des villes de France, mêlés et séparés, solidaires du sort commun et unis dans leur identité inébranlable.
Ils ont su concilier les identités diverses et parfois antinomiques qui les ont assaillis, et ont réalisé le rêve de la Rose de nos enfances, c’est ainsi qu’ils poursuivent leur histoire provisoirement apaisée dans l’espérance renouvelée d’un Monde de paix et de concorde.
14 juin 2017
     Charles BACCOUCHE

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