CHANT DU DEPART APRES AVOIR VEILLE AU SALUT DE L'EMPIRE
1962 fut, certes, une date fatidique, mais le fantastique l'emportait toujours, pour l’enfant que j’étais. La guerre incompréhensible pour ceux qui aimaient leur terre d’origine s’était ébranlée progressivement engendrant mille maux. Mais peu importait puisqu’ils l’aimaient de toutes les fibres de leur chair, de tous flux impétueux de leur sang déjà offert, et coulant derechef, comme s’il leur fallait toujours prouver leur amour de la patrie, la belle que voilà, qui allait les refouler impitoyablement, encor et encor, les rouler dans sa bave de crapaud indélicate ! La chanson de Sardou est admirable de sens et d'éloquence :
« NE M’APPELEZ PLUS JAMAIS France, LA France ELLE M’A LAISSE TOMBER!.... » Quelle vérité, d’autant qu’au moment où j’écris ces lignes, nous sommes en pleine préparation des élections présidentielles, et tout le « bébête show » des femmes et hommes politiques me fait mourir de rire !.....................
A part la conquête du pouvoir, ne sont-ils pas tous prêts à vous larguer le moment venu sans vous demander votre reste. Savez-vous qu’à ce jour, le voile impudique du mot « pied-noir »commence à se lever imperceptiblement, encore trop tôt, encore trop ci, encore trop ça !... comme diraient certains « ni apologie, ni repentance… » ?
Mais moi, je n’ai pas oublié !
Croient-ils vraiment que j’ai pu leur rendre les clefs de ma ville natale ? Non !
Les plus précieuses, les plus magiques, ils ne les auront aucunement, car je les garde dans les tiroirs secrets de mes rêveries profondes, de mes drames silencieux, de mes nuits lumineuses, de mes songes indéfectibles. Voyiez le pavoisement de mon drapeau de fidélité à Alger, ma ville, mon pays !
Ils nous ont infligé tant de peines, oubliant les descendants de ces victimes que furent nos familles éclatées, disséminées, démembrées sur leur « belle » terre « d’accueil » !... Mais nous sommes là bien vivants, bien prêts à leur jeter à la face les faits qui découlent de leur abjection !...comme autant de flèches empoisonnées sur les cibles qu'ils nous présentent!
Coucou souriez !
Hélas, pour eux ! Rosalind s’apprête à rendre grâce à la mémoire de ceux qui lui furent très chers, avec une redoutable ténacité, voici ce qu’elle vécut, et qu’ils pensent, pour elle « oublié » !...
Non, je n’ai pas oublié : Alger tu es là dans mon cœur, immortellement belle, sanglotant à nos départs, à la dérive de la hideur des exactions fomentées en toi, et contre toi et nous, Français et Arabes confondus, autant de traces de la haine ambiante…apportée de l’autre côté, de cette métropole ignorante de nos faits et gestes.
Souviens-toi Rosalind ! Réveille ta mémoire !
Reviennent alors me ressaisir, les effluves Alger, de ta mer, perpétuellement iodées, les vaguelettes vaporeuse ineffablement, les ombres délicieuses des grands arbres, les promenades des allées majestueuses, l’ardente étreinte de l’astre royal du jour, la grâce des allées de gravier blanc, la distinction hautaine des beaux immeubles unis dans un coude à coude silencieux , les avenues et les routes entrelacées et leurs joyeux soupirs, les sauterelles impromptues, les eucalyptus aux senteurs pénétrantes, les palmiers chevelus, les chemins poudreux menant aux campagnes sereines et fécondes, s’unissant en un immense éden tropical absolument incomparable !
Se détachent, encor et encor, des images anciennes : celle, sereine de la ville dans les années 1950 se fait mémoire vivante, en même temps que superbe réalité, celle des dames, belles comme des anges aux grandes jupes tourbillonnantes, les cheveux remontés en opulents ou gracieux chignons, allant élégantes par les rues proprement alignées, hochant la tête avec distinction au bonjour aimable d’un voisin, celle des belles baigneuses en maillot une pièce, aux formes voluptueuses de l’époque, glissant majestueusement dans les ondes chatoyantes d’une mer chaleureuse, les accueillant dans son ventre de bleu cristal avec un bruit d’ailes à peine défroissées…
A SUIVRE........
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