mardi 2 avril 2019

MA MERE, LA PAUVRE……….que j'écris actuellement


MA MERE, LA PAUVRE……….

Chez moi, c’était la maison du bon dieu. Du bon dieu et de ma mère ! Ma mère la pauvre ! La pauvre ou raïbah dans le langage judéo-arabe de ma mère et de toutes les femmes de la famille.
Elle était pas du genre à s’arracher la figure mais presque. Y faut dire  que la vie elle l’avait pas gâtée. Veuve à 36 ans avec trois chitanes en bas âge !
Alors, obligé, elle a été mon père et ma mère. Ma mere la pauvre !
Chez moi, c’était pas grand mais vous allez pas me faire dire ce que je veux pas dire, c’était quand même pas mesquinette. Trois pièces, cuisine, salle de bain avec douche s’il vous plait, un grand couloir et un balcon. Purée, j’ai trouvé ma voie, agent immobilier, je serai quand je serai grand !
A Bab El Oued, c’était pas tous les appartements qui avaient une salle de bain avec la douche et tout ! Chez moi, la douche, elle servait à rien parce que, ma mère, la pauvre, chaque sou, c’étai un sou. Alors, macache, la douche quand on a la mer méditerranée qui était en bas la maison. Et ouais, il faut pas exagérer, quand même. Ma mère, la pauvre, elle s’escrimait pour qu’on mange à notre faim tous les trois (à ouais, elle avait trois morfals à la maison) alors, le gaspillage très peu pour nous. C’était pas les deux orphelines mais on en étaient pas loin.
Ouais, alors où j’en étais ? Un autre que moi, il aurait écrit « où en étais-je ? ». Zarmah, je suis un écrivain genre Voltaire et Rousseau. Total, même pas je sais qui c’est ces deux zigotos dont il parle Serge Reggiani dans ses chansons ! Qué, où en étais-je ? Aouah, c’est pas mon genre de faire zbérote, cinéma en relief et tutti quanti ! En plus, c’est plus facile d’écrire comme je parle sans faire des tournures de phrases qu’après je sais plus si je dois tourner à droite ou à gauche, allez va, laissez-moi mon libre arbitre ( là,  je joue à çuila qui parle comme une tapette).
Chez  moi, bon dieu ou pas bon dieu, c’était à Bab El Oued, juste à la frontière de l’esplanade et du jardin guillemin, là où elle commence l’avenue de la Bouzaréah. Cette avenue d’la Bouzaréah, combien de fois , j’ai tapé l’andar et venir jusqu’aux trois horloges, amman ! Ma mère la pauvre, rien qu’elle allait chez sa sœur, tata Nadine qu’elle habitait au 2 rue Suffren, juste en tournant l’avenue de la Bouzaréah. Elle allait aussi chez ses autres sœurs dans la casbah, rue Marengo où c’est là qu’elle est née. Le 31 rue Marengo, c’était un p’tit appartement où s’entassaient six frères et sœurs, plus mon grand père et ma grand-mère, j’vous dis pas la dose d’amour qui voyageait dans ce petit trois pièces. Pour se laver, yavait le bain maure de la rue Boulabah. TROIS FOIS PAR SEMAINE. Et pourtant, mes tantes et mes oncles y brillaient comme un sou neuf.
Et dire qu’on se plaint, c’est la modernité ! J't'en foutrais de la modernité avec un grand coup de pied où je pense !
Allez, mieux je parle de ma mère la pauvre et de son histoire.
C’est que ma mère la pauvre, elle avait trois sœurs et deux frères (5 dans vos yeux !) et ils étaient comme les doigts de la main, cul et chemise ya pas mieux. Pas une fois et même, pas la moitié d’une fois, je les ai vus  se disputer. Ils s’entendaient comme loirons en foire (ces expressions, la purée !). Jamais, un mot plus haut que l’autre, toujours à se faire des bosses de rigolade, à nous engueuler parce qu’on se mettait en nage, enfin, en un mot comme en 124000, les réunions de famille et la morosité, c’était antinomique.
Purée, ces réunions de famille, dé ! Ma mère la pauvre, même si l’argent on en avait pas bezef, bessif, elle voulait recevoir. Et, nous autres, ses fils, alors que d’habitude, chitanes comme des voyous, dès qu’on avait un moment, on descendait en bas la rue, on restait à la maison tellement on aimait ces rassemblements qui se renouvelaient chaque semaine. Avec la chiée de cousins que j’avais, on tapait des matches de foot dans notre couloir pendant que les hommes y tapaient la belote ou la ronda en écoutant Georges Briquet qui commentait le tour de France dans le transistor alors que les femmes, elles se rappelaient leurs souvenirs de leur casbah judéo-arabe. Ou alors, elles disaient du mal de leurs maris ! Ou mieux, elles parlaient cuisine. Alors, rien qu’on les écoutait et la bave elle nous sortait par les yeux. Parce que, attention, ma mère et ses sœurs, c’étaient les reines de la cuisine judéo-italo-espagno-arabo-martienne. Tout, elles savaient faire avec leurs mains et sans appareil ménager que s’ils existaient, y avait que les richards qui pouvaient se les payer. Les Richard, les Paulo, les Jacky……je pourrais citer tous le dictionnaire des prénoms mais j’ai pitié des lecteurs …...
Comme je suis chauvin, ma mère la pauvre, c’était elle qu’elle était la plus forte ! Ma parole si je mens que le bon dieu y me crève les oreilles parce que s’il me crève les yeux, plus rien, je vois !
Chez moi, comme on était loin d’être de la famille des Rothschild, les ortolans, même pas on savait ce que c’était. Nous autres, on préférait la loubia. C’était un plat de haricots rouges que certaines mauvaises langues appelaient potage symphonique. Et sans viande parce qu’elle était trop chère pour le porte-monnaie désargenté de ma mère la pauvre. Mais, pour nous, la cuisine de ma mère, y avait pas mieux. Un véritable jardin des délices. Elle aurait pu être décoratrice, ma mère parce que ses plats, ma parole,  ils auraient pu être exposés au Louvre à coté de la Joconde. Avec trois fois rien et même avec deux fois rien, le repas de gala y nous accueillait tous les jours.
C’est comme le ménage, nous comme on était les bebesso à notre mère,on tentait de la soulager. On, et quand je dis on, total je devrais dire je parce que j’étais le chaouch de mes frères ainé et cadet, on lui faisait les commissions, on rangeait nos affaires dans les tiroirs du garde-robe (ce garde-robe, raïeb, il avait honte tellement on rangeait le linge à la mords-moi le nœud !), on refaisait le lit et tout contents, on attendait le jugement de ma mère qui nous lançait un regard magnanime, et, en deux temps, trois mouvements, nos lits y reprenaient visage humain.

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