dimanche 28 avril 2019

extrait de MA MERE LA PAUVRE OU RAIBAH MA MERE que j'écris actuellement


Jacky, y travaillait bien en classe. Mais au moment de passer en cinquième, il a été obligé d’arrêter les études au collège Guillemin parce que ma mère, elle arrivait pas à joindre les deux bouts, raïbah ! Pour elle, ce fut un crève-cœur (elle le votait déjà docteur) mais pour lui, ça lui en a touché une, sans faire bouger l’autre. Rue Koechlin, où j’habite, monsieur Mesguish il avait deux magasins à Belcourt. Il a embauché mon frère et le voila qui devient vendeur en chemiserie pour hommes. Mais le plus important, c’est que monsieur, y va gagner de quoi faire bouillir la marmite. Il est tout content, ce babao ! Non, la vérité, ma mère elle est heureuse. Jacky, tous les jours, y s’habille comme un lord, pantalon coutil, chemise soua, soua et chaussures bien cirées. Ma mère, elle est aux anges.
C’est bizarre comme les femmes y faut que tout l’Algérie soit au courant de c’qui se passe à la maison. Pourtant, ma mère, elle est pas comme ça. Elle est pas pipelette comme un panier percé. Elle l’a dit seulement à ses sœurs, à ses tantes, à ses voisines et, de fil en aiguille, tout Alger y félicite mon frère. Pour être heureux, vivons cachés,  c’est pas un proverbe de chez nous, ça ! Nous, plus on est content et plus on en parle. La langue bien pendue, la langue de bois, on s’en fout nous autres, le tout c’est que ça se sache. Hé, à quoi ca sert  une bouche, alors ? Enfin, ma mère, elle est contente, et c’est ça qui compte.
Tonton Léon, c’est son frère avec tonton William  que lui aussi c’est le meilleur tailleur d’Algérie, de France, du monde et de la planète Mars. J’suis pas chauvin ! Juste un chouïa ! Ma mère, la pauvre, elle est fière parce qu’il a un atelier rue Valentin, en ville. Des cinq, et dix, et quinze, et vingt, tu en veux, toi ? Pour lui porter chance ! C’est lui qui m’a confectionné mon costume de ma bar misvah. Tain, la classe. Ma mère, la pauvre, elle en pouvait plus de fierté. Elle avait réussi à faire des ses chitanes des p’tits hommes ! De là-haut, mon père, il regardait le tableau de sa famille avec satisfaction. Ma mère, son épouse, avait su contourner les obstacles que  son décès avait dressés devant elle. Bon, ne sortez pas les mouchoirs, je vais me reprendre.

C’est que la Bar Misvah, ça coûte les yeux de la tête. Grace à Dieu,  la famille,  quand ils sont tous là, on dirait une manifestation. La mouine, j’vous dis pas ! Oh, et puis, je vous dis ! Les sœurs, les frères, les cousines, les cousins, les enfants issus des familles Durand (c’est ma mère) et Zakine, on est une chiée plus 100, ajoutez les voisines, les copains, celles que c’est vilain de pas les inviter, celles des amies de jeunesse de ma mère qu’on appelle tata,  le rabbin…… larbobah, tous les sous à récolter  pour payer le cinéma aux jeunes. Les adultes, y déroulent les teffilins et par ici, la monnaie, ainsi d’suite ! Sans compter les cadeaux !
 


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