Bartali "Juste parmi les nations"
Gino Bartali fut l'un des plus grands champions cyclistes des années 1930 et 40. © DR
CYCLISME - Le défunt champion italien a reçu la plus haute distinction décernée par Israël.
C'est sans doute la distinction la plus
forte que Gino Bartali ait décrochée. Le champion italien, mort en 2000 à
l'âge de 85 ans, a en effet été fait "Juste parmi les nations", lundi,
par Israël. Il s'agit de la plus haute distinction décernée par l'Etat
hébreux à ceux qui ont sauvé au péril de leur vie des Juifs pendant la
Shoah.
"Pendant l'occupation allemande de
l'Italie (à partir de septembre 1943), Bartali, un fervent catholique,
faisait partie d'un réseau de sauvetage conduit par le rabbin de
Florence Nathan Cassuto conjointement avec l'archevêque de Florence le
cardinal Elia Angelo Dalla Costa", a expliqué dans un communiqué Yad
Vachem, mémorial consacré au souvenir et à l'étude de la Shoah. "Gino
Bartali servait de messager au réseau, dissimulant des documents
falsifiés dans sa bicyclette et les transportant entre les villes, sous
le couvert de son entraînement."
Des documents cachés dans la selle et le cadre
Cette reconnaissance couronne la
mobilisation de la communauté juive d'Italie, en particulier de sa ville
de Florence, qui a permis de recueillir des témoignages directs
manquant jusqu'alors pour faire avancer le dossier. Bartali, surnommé
"Gino le pieux" en raison de sa foi, fut l'un des plus grands champions
des années 1930 et 1940. Il remporta deux Tours d'Italie d'affilée, en
1936 et 1937, avant d'inscrire son nom au palmarès du Tour de France
l'année suivante, en 1938.
Ce succès de prestige sur la Grande
Boucle fut instrumentalisé par la dictature italienne de Benito
Mussolini, alors que le coureur, brillant également dans les classiques
(vainqueur quatre fois de Milan-San Remo et trois fois du Tour de
Lombardie au cours de sa carrière), n'avait jamais caché son aversion
pour le fascisme.
Pendant la Seconde Guerre mondiale,
Bartali quittait régulièrement son domicile florentin sous couvert de
sorties d'entraînement pour se rendre à Assise, dans l'Ombrie, mais
aussi à Gênes et dans les Abruzzes, des trajets de plus de 350
kilomètres aller-retour. Il faisait le tour des couvents, dissimulant
dans la selle et le cadre de son vélo des photos et autres documents
pour établir de faux papiers. Bartali fut arrêté à deux reprises pendant
la Seconde guerre mondiale, la première fois pour avoir cherché à
trouver refuge au Vatican, la seconde après avoir participé à des envois
de vivres.
A l'issue du conflit, Bartali reprit la
compétition et remporta un deuxième Tour de France, dix ans après le
premier, en 1948. Désormais concurrencé par son compatriote Fausto
Coppi, qui le devança sur la Grande Boucle 1949, Bartali remporta un
dernier grand titre en 1952, avec un quatrième maillot de champion
d'Italie. Victime d'un grave accident en 1953, il mit un terme à sa
carrière en 1955. Cinquante-huit plus tard, son nom va désormais être
gravé sur un mur dans la forêt de Jérusalem, aux abords de Yad Vachem,
mur qui recense les 24.000 personnes considérées comme "Justes parmi les
nations".
Nicolas Rouyer
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