Les craintes de l'aîné des
DURAN eurent tôt fait de s'avérer exactes. Affleurant le fanatisme religieux,
le fils de MAHI ED DINE usa et abusa de la terreur pour convaincre les indécis.
Léon Juda assista, impuissant, à des décapitations et exécutions sommaires de
pauvres fellahs étrangers aux métiers et à l'usage des armes. Sa présence
rassurait ABD EL KADER autant qu'elle l'indisposait car se reflétaient dans le
regard de son ami juif ses turpitudes qui devenaient sources de discorde lors
de consultations privées.
Visiblement contrarié par la
nouvelle personnalité de l'Emir, Léon
Juda reprit la route côtière pour ALGER.
L’année de tous les dangers
1833 fût l'année de tous les dangers et de toutes
les humiliations pour la Maison DURAN. L'animosité de l'Intendant Général GENTY
DE BUSSY la poursuivit tout au long du premier semestre. Une animosité
personnelle, entretenue par la méfiance
des trois chefs de la Nation Juive sur la scolarité des enfants
israélites. Les engagements pris par le RABBINAT DE FRANCE restés au stade des
promesses, la crise annoncée par les pessimistes semblait inéluctable.
GENTY
DE BUSSY rendit responsables les Rabbins et les "moqqadem" qui,
estimait-il, n'exerçaient pas assez fermement leur autorité sur la communauté.
Les porteurs du message divin étant intouchables, il reporta ses griefs sur la
représentation civile de ses trois membres avec un acharnement particulier envers
Léon Juda. Tout commença en février. A la requête du Ministère Public et de son
administrateur GENTY DE BUSSY, Léon Juda subit un procès en correctionnel sous
la mensongère accusation d'avoir soustrait une lettre contenant huit mille
piastres, commission payée au "juif Ben DURAN" par la Maison LUCE de
MARSEILLE pour ses ventes au Maghreb.
Malgré
la relaxe énoncée, Léon Juda sortit meurtri de cette aventure. Hélas, le plus
dur restait à venir.
Sur
l'initiative du revanchard GENTY DE BUSSY, il sera retenu captif en la prison
BARBEROUSSSE d'ALGER. Accusé d'être l'un des associés d'une société rivale de
celle d'un nommé BEN MARABET avec lequel l'Intendant Général avait, secrètement,
lié ses intérêts, il fût sommé de payer une amende de quarante trois mille
francs pour avoir tourné la loi du commerce à son avantage. Il écrivit alors,
du fond de son cachot, au Maréchal CLAUZEL à PARIS, pour se plaindre de la
persécution dont il était l'objet de la part de GENTY DE BUSSY qui usait de son
pouvoir pour éliminer, sous de fallacieuses accusations, un concurrent gênant
sur le plan commercial.
"......Retenu captif dans la prison d'ALGER
depuis environ trois mois, par suite d'une condamnation en paiement d'une somme
de 43000 et quelques cent francs que je
ne dois pas, je me permets de vous adresser quelques lignes, autant pour vous
rappeler à votre bon souvenir que de vous prier de vouloir bien vous intéresser
à moi dans des circonstances où, injustement présenté par ceux là même que j'ai
obligé, convoitent ma ruine et mes tourments. Mr FOUGEROUX................aura
dû vous apprendre qu'emprisonné d'abord à la requête du ministère public, je me
suis vu dans l'humiliation de supporter un procès correctionnel sous
l'accusation d'avoir voulu soustraire frauduleusement une lettre qui contenait
l'envoi par une maison de MARSEILLE de 8000 piastres, procès qui a eu pour
résultat un jugement de relaxe qui a laissé à mes persécuteurs la honte de
l'avoir engagé. Vous le savez, Mr le Maréchal, sans avoir fait pour la France
tout ce que j'aurai voulu, j'ai eu cependant le bonheur de lui être utile.
Je suis bien mal récompensé
car depuis que les nouveaux administrateurs nous régissent, je ne trouve
qu'ingratitude et injustice. Aussi, Maures, juifs, Indigènes et Européens, tous
regrettent l'heureuse administration du Général CLAUZEL, tous désirent son
retour. Tous, enfin espèrent qu'il
viendra nous délivrer du joug de la tyrannie. Permettez-moi, Mr le Maréchal, de
vous demander votre bienveillante protection Je suis ici sans appui, sans
protecteur, à vous seul appartient de me faire rendre justice.
PS: J'avais d'abord voulu
vous taire le nom de l'administrateur dont je parle mais je le nomme, c'est Mr
GENTY DE BUSSY, intéressé aux entreprises de BEN MARABET et conséquemment à la
perte de mon procès."
C'est
VOIROL, successeur de SAVARY, miné par la maladie en avril 1833, qui signera
l'acte de libération de Léon Juda BEN DURAN pour services rendus aux autorités
françaises d'Afrique du Nord sur ordre du
Maréchal CLAUZEL.
YYY
A SUIVRE......................
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