vendredi 13 avril 2012

HORIZONS BLEUS de Hubert Zakine

Le lendemain matin, après une nuit où j’ai flirté avec la folie, à savoir si la colère de Colette elle a pas déteint sur la météo. Neptune il est fou de rage. La Méditerranée elle tape la danse du ventre sous une pluie battante. Les chutes du Niagara c’est plus au Canada, c’est aux Horizons Bleus. Y manque plus que Gilbert Roland qui traversait les chutes comme un funambule sur son fil dans un film que je me rappelle plus le titre avec la tête de babao que j’suis.

Purée, la marabounta qui tombe ! Le pull, je l’enfile fissa fissa comme un mort de froid. Serge y défie les éléments déchaînés parce que lui il est mort de faim ; alors y monte chercher le pain, le lait et le beurre chez Argento. Ch’uis assis, les mains entre les cuisses à subir les embruns que le vent y me crache à la figure comme un mal élevé qu’il est.

Cette solitude, face à la folie de la météo, c’est un moment privilégié même si je me gèle les cacahuètes, soua-soua. Le ciel on sait même pas où y commence et où elle commence la mer. (Un autre il aurait dit « on voit pas l’horizon »).

Purée ! C’est là que je pense à Colette. Elle doit être plus en colère que dame nature. Surtout que on m’a toujours dit que la colère c’est une seconde nature chez les « donzelles ». Jusqu’à hier soir, elle m’avait donné l’impression de maîtriser ses nerfs et de penser que la colère elle était mauvaise conseillère, et puis patatras ! Quelle contenance je vais prendre ? Dieu seul le sait.

Soit je joue le dur style Kirk Douglas dans « ok corral » soit je rampe style Jack Lemmon dans « la garçonnière » mais la vérité, avec l’épisode Francette, je serais le roi des falampo si je faisais pas bonne figure à ma petite chinoise.

Petit à petit, les fainéants y se lèvent et chaque fois c’est le même étonnement ponctué de gros mots :
« Oh ! Putain ! C’est l’hiver ou quoi ? »

Après y se tapent le chocolat chaud pour les petits et le café au lait pour les grands. Dans tous les pays où l’hiver y fait que passer sans repasser, une certaine effervescence elle envahit les cœurs. Une joie intérieure, une exaltation inexplicable elle s’empare de chacun comme si le père noël y descendait sur terre. Ici, on dirait que les Horizons Bleus, on a gagné à la loterie nationale. Plusse la marabounta elle dégringole du ciel et plusse on est tous contents. Le rire y maquille tous les visages.

Même ceux qui sont vilains, pas beaux et laids y rayonnent de bonheur qu’à force y deviennent magnifiques. Sauf Luc qui garde sa tête de coulo quelle que soit la météo. Purée, ch’uis méchant comme une teigne.

Colette elle arrive sur la terrasse emmitouflée dans un petit ciré jaune. Je lui souris jaune comme le ciré. Je plaisante et pourtant j’en mène pas large (« j’en mène pas large », la vérité, qu’est-ce que ça veut dire cette expression quand on l’analyse froidement ?)

Même pas Ma petite chinoise, elle me rend mon sourire. Ni jaune, ni rouge ni arc en ciel. Aouah ! Elle s’est levée de la cuisse gauche. Elle me regarde avec des yeux assassins. Si un regard y pouvait tuer, tout Alger y serait en train de me pleurer.

Les manchettes des journaux : « Le pauvre, il était si beau ! » La page suivante « et si intelligent !» même la page des sports, elle se fendrait d’un titre à la une :« ce sont toujours les meilleurs qui s’en vont ! Meilleur au football, meilleur aux noyaux, un as de la carriole »

BA ! BA !BA ! Le chagrin qu’elle aurait ALGER. A mes obsèques, même Luc la tapette y verserait quelques larmes. Purée, tous les amis que j’avais et j’le savais pas. Tous, y m’aimaient ! Re BA ! BA !BA ! Dé !

Comme la pluie elle pleure de plus belle, la terrasse elle devient piscine. L’inondation elle nous pend au nez. Alors, les hommes y coupent le poil qu’y z’ont dans la main pour tendre une grande bâche au-dessus de nos têtes. Le camping au cabanon, même en Amérique y connaissent pas. Purée, pour arrimer la toile, l’inspecteur des travaux finis, Papa Vals, rien qu’y critique : « Tu vois pas que la ficelle elle est trop courte, spèce de bourricot d’Espagne ! »

Papa Bensimon y renchérit : « c’est pas la ficelle qu’elle est trop courte, c’est tes bras ! »

--« Et puis tch’es sur qu’elle est étanche cette bâche ? »

--« Va étancher ta soif, spèce de kilo que tch’es. Laisse faire les techniciens ! » Ca c’est tonton Robert qu’il en touche pas une en travail manuel. Lui, c’est l’intellectuel de la famille que tout le monde on le voyait président de quelque chose. Total il est président de rien du tout. Sa mère, la pauvre toutes les excuses il lui trouve : « Des intelligents comme lui, yen a pas deux à Bab El Oued. Seulement il a pas eu de chance, le pauvre mon fils ! »

Tant bien que mal, la toile elle tient. Pour l’amour de Dieu, mais elle tient.


A SUIVRE........................

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