lundi 15 novembre 2010

ORAN DE MIREILLE ATTIAS

Comme on ne va pas jusqu'à la fin des temps reprocher à Camus de n'avoir vu qu'une ville ordinaire, rien de plus qu'une Préfecture Française de la côte algérienne ( C'est l'introduction de " La Peste "), nous allons plutôt écouter son professeur de philosophie, Jean Grenier : " Cette tache blanche, c'est Oran ; cette tache d'encre violette, c'est la Méditerranée ; rien n'est plus beau pour celui qui aime d'un même amour l'Afrique et la Méditerranée que de contempler leur union depuis Santa Cruz ".

Voyons donc la création d'Oran, d'abord ville phénicienne puis romaine ; ensuite, après 300 ans de disparition, Ouharane fut refuge de pillards et de corsaires, puis Oran espagnole jusqu'au tremblement de terre en 1790 et l'occupation par les Turcs jusqu'à l'arrivée des Français.

Avant d'en arriver à la période douloureuse qui précède notre départ, nous ferons une promenade dans cette ville qu'aucun nuage n'assombrit encore et qui est devenue la cité la plus animée, le centre commercial le plus actif d'Algérie. Après l'évocation de ces années, nous nous promènerons dans l'Oran d'aujourd'hui redevenue Wharan, une ville éteinte et dont le coeur ne bat plus.

L'agglomération d'Oran remonte aux premiers âges de l'humanité. Les recherches de paléontologistes et de naturalistes ont établi l'existence d'un Oran préhistorique très important et l'on peut visiter encore les nombreuses grottes du Murdjadjo où nos premiers aïeux avaient laissé des traces de leur passage et des vestiges de leurs industries : coup de poing chelléen, haches, couteaux ou scies en silex, en quartzite ou en grès siliceux, toutes ces pièces que nous avons pu admirer dans la salle d'ethnographie au premier étage du musée Demaeght.

Ainsi, la belle grotte aux trois ouvertures qui se trouve à l'origine du ravin de Noiseux abritait certainement un notable ou un riche négociant, sans doute en vins, car n'oublions pas que le Murdjadjo était couvert de vignes sauvages fournissant un vin rude tel que le feront plus tard les Pères Blancs de Misserghin.

Dès les premiers siècles du IIème millénaire avant notre ère, les Phéniciens fondèrent des établissements commerciaux et amenèrent avec eux les premiers Juifs. Carthage prit ensuite la relève mais ce sont les Romains qui assurèrent la prospérité de Portus Divini qui englobait les sites d'Oran et de Mers-El-Kébir. La pratique de l'irrigation permit le développement des plantations d'oliviers et de vignes, et l'accroissement des cultures céréalières et de l'élevage. L'Oranie devint ainsi une des plus riches contrées de l'Occident.

Au IVème et au Vème siècles, l'organisation romaine commence à se désagréger et après les invasions des Vandales, ces envahisseurs germaniques venus de l'Espagne, débarqués en 455 et surtout la conquête par les arabes en 645, la cité s'éteint et disparaît.

Il faut donc situer la véritable création de la ville d'Oran aux environs de 903, lorsque des marchands arabes de la côte d'Andalousie construisent quelques habitations et un entrepôt pour leur commerce avec Tlemcen et les populations nomades du Sahara. Cet établissement prospère rapidement.

La ville s'appelle alors Wharan, nom qui signifie : endroit difficile d'accès ou coupure. Ce mot serait alors expliqué par le site : la vallée qui sépare le front du Murdjadjo de celui de la montagne des Lions est une coupure. Plus probablement, la ville doit son nom au calife Bou Charam Ouaraham qui gouvernait la ville au Xème siècle. Le nom d'Oran apparaîtra pour la première fois dans un portulan génois de 1384.

En 910, Oran est occupé par les Fatimides, une dynastie chi'ite qui avait Kairouan pour capitale.

En 1083, c'est au tour des Almovarides. Cette dynastie berbère occupe le sud de l'Espagne et la plus grande partie de l'Afrique du Nord. Ils furent vainqueurs notamment des armées chrétiennes conduites par El Cid Campéador (1043-1099), avant de succomber sous ses assauts. Rappelons que son surnom du Cid vient de l'arabe sidi (mon seigneur).

En 1137, les Almohades conduits par Abd El Moumin, ce génie militaire né dans le pays de Nédroma, occupèrent toute l'Afrique du Nord, les royaumes de Cordoue et de Grenade. Ils furent défaits par les chrétiens à Las Navas de Tolosa le 17 juillet 1212.

En 1242, la dynastie berbère des Mérinides occupe le royaume de Grenade, tout le Maroc et une partie de l'Algérie, guère plus loin qu'Oran cependant. Ils étaient surtout de grands bâtisseurs. Mais malgré toutes ces occupations successives, Oran devient peu à peu une ville puissante.

Le système douanier, le commerce avec Marseille, Gènes et surtout Venise avec qui Oran a signé un traité de Commerce en 1250 font des Oranais des gens riches. Ils exportent de la laine, des peaux, des burnous fins, des tapis, des haïks, du cumin, des noix de Galle (ou galle d'Alep, c'est la tumeur résultant de la réaction des végétaux piqués par un insecte) et parfois aussi des esclaves noirs.

Vers la fin du XIVème siècle, Oran a alors atteint un tel degré de prospérité qu'un contemporain enthousiaste, Ibn Khaldoun, le célèbre historien arabe pouvait s'écrier : " Oran est supérieure à toutes les autres villes par son commerce. C'est le paradis du malheureux. Celui qui vient pauvre dans ses murs en sort riche. ". Mais la richesse de la ville excite la convoitise de nombreux princes berbères qui se disputent sa possession.

Oran est alors sous la coupe des Beni Zian, les gouverneurs de Tlemcen. Le luxe et la richesse portent les Oranais aux excès les plus condamnables. Ville de corruption et de relâchement dans les moeurs, Oran devient le berceau de la piraterie et Mers El Kébir un nid de forbans. Ces pirates poussaient l'insolence jusqu'à venir enlever les galions des Indes sous le feu des batteries espagnoles et faisaient continuellement des descentes armées, des côtes de l'Andalousie à Gibraltar.

Dans les premiers jours de juillet 1501, une expédition préparée par les Portugais tente de débarquer à la plage des Andalouses qui est ainsi nommée car c'est à cet endroit que débarquèrent les premiers Maures chassés d'Espagne qui furent pris par les populations autochtones pour des Andalous. La flotte surprise par un vent contraire louvoya pendant trois jours. Les arabes eurent le temps de réunir des hommes et reprirent l'avantage . Cette expédition échoua et c'est seulement le 19 mai 1509 que les Espagnols prirent la ville . Ils l'occupèrent cette première fois jusqu 'en 1708.

C'est de cette époque que datent les constructions militaires : En 1690 Don Alvarez de Bzan y Sylva, marquis de Santa Cruz fait construire au sommet du pic de l'Aidour le fort qui porte son nom.

En 1708, les Turcs sous le commandement du Bey Mustapha ben Youssef, dit Bou Chlahem, l'homme aux grandes moustaches, le fondateur de la ville de Mascara s'empare d'Oran.

En 1732, les Espagnols sont de retour à la suite de la victoire remportée à Aïn El Turk par le Comte de Mortemar.

En 1780, les Espagnols entament des pourparlers avec l'Angleterre en vue d'un échange avec Gibraltar. C'est un échec, heureusement ! Sinon nous serions Anglais aujourd'hui !

Dans la nuit du 8 au 9 octobre 1790, peu après 1 heure du matin, 22 secousses successives ébranlent la ville et font s'écrouler une grande partie des maisons. En moins de 7 minutes, 3000 personnes sont ensevelies. Des secousses se font sentir jusqu'au 22 novembre.

A la suite de ce terrible événement, le roi d'Espagne Charles IV ne s'intéressant plus à l'occupation de cette ville d'Oran qui devenait de plus en plus onéreuse et périlleuse, entame des discussions avec le bey d'Alger. Un accord est conclu, et le 6 mars 1792, le bey Mohammed El Kébir prend possession d'Oran . Jusqu'en 1830, les beys firent d'Oran leur capitale au détriment de Mascara.

Le 4 janvier 1831, les Français font leur entrée officielle dans la ville. Ce n'est pas tout de suite la paix - au contraire -. Abd El Kader va créer l'insécurité en harcelant l'armée française et il faudra 12 ans avant que le duc d'Aumale ne fasse prisonnier toute sa smalah en mai 1843.

Abd El Kader ne fera sa soumission à Louis-Philippe que le 23 décembre 1847. Mais dès 1835, le génie avait entrepris la route en corniche vers Mers El Kébir avec le percement d'un tunnel et les Français s'étaient lancés dans la restauration de la ville :

- En 1836, le général de Létang crée la magnifique promenade d'où l'on peut jouir d'un si beau panorama.

- De 1841 à 1845, Lamoricière crée un village regroupant les étrangers : Le village des Djalis (étrangers), appelé ensuite le village nègre avant de devenir la " ville nouvelle ".

- En 1848, un hôpital civil est édifié rue du Cirque.


A SUIVRE......

1 commentaire:

  1. Thanks a lot for all this, merry christmas and a happy new year from wahran, ouahran, oran or simply bladek in front of god, take care.

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