dimanche 31 janvier 2010

TCHALEFS D'UN ENFANT DE BAB EL OUED -8-


SOUVENIRS DE L’ECOLE ROCHAMBEAU

Parmi les souvenirs que, même les plus babaos d’entre nous y veulent pas oublier c’est, sans conteste, l’école qui fait encore couler quelques larmes sur nos joues mal rasées. Peut être que les bancs de l’école y z’ont usé nos culottes courtes, peut être que les punitions à faire à la maison en cachette pour que notre mère, elle attrape pas « un coup de sang », elles nous gênaient pas tant que ça, peut être que tout au fond de nos cœurs de petits « chitanes » mal élevés, le nom de nos maitres et maitresses y se sont inscrits indélébiles dans nos mémoires, plus profondément en tous cas qu’on voudrait bien le laisser deviner, aujourd’hui qu’on est devenus grands. Qué, devenus grands ! Quand on repense à nos années de billets d’honneur, de craie blanche et de tableau noir, on redevient des enfants pas très sages, mais des enfants quand même qui aiment évoquer ces années de lumière lors de retrouvailles dans un sous bois enfumé. Alors, on se souvient de Mrs Serror, Papa Ayache, Pietri, Castellani, Vittori, Benfredj, notre chère madame Dahan et bien d’autres avec des étoiles au fond des yeux. Pour ma part, j’ai une tendresse toute particulière pour un homme et une femme qui ont gravé dans ma mémoire des souvenirs indélébiles. Et lorsque, au hasard de la vie, dans une rue de Toulon, je me suis retrouvé nez à nez avec Mr Ayache, bien que de très (trop) nombreuses années s’étaient enfuies depuis le jour fatidique de l’indépendance, je suis redevenu l’enfant qu’il avait quitté le 30 Juin 1956. Surtout qu’il m’a apostrophé par mon nom comme si on s’était vu la veille :
--« Ô Zakine, comment tu vas ? »
--« Bonjour Mr Ayache, vous vous rappelez de moi ? »
--« Je me rappelle de tous MES élèves, je dis bien de tous ! »
Tous SES élèves, au cours des années où il exerça, lui avaient témoigné leur affection en l’appelant non pas Mr Ayache mais PAPA AYACHE. Ainsi, au fil du temps et des générations, le surnom incrusté dans les cœurs d’adolescents est demeuré dans nos mémoires d’hommes. Avec mon ami, Henri Agullo, nous l’avons fêté lors des retrouvailles de l’A.B.E.O et plus tard, avec mon frère qui fut lui aussi SON élève, nous l’avons porté vers sa dernière demeure. Nous lui avons rendu, à la fin de sa vie, l’affection, le respect et l’hommage que cet homme de bien méritait. Et dans ma salle à manger trone deux éléphants en serre livre que je lui avais offert au nom de tous les élèves pour la fête de Noël 1956. Ce serre livre, sa fille me les avait offert lorsque, bien après, je l'avais accompagné dans sa maladie.
Une Dame avec un grand D était la directrice de l’école maternelle de la rue Rochambeau. Tous les élèves gardent de Madame Dahan un souvenir ému car cette Dame nous impressionnait par sa beauté, sa prestance et son caractère. Nous l’avons retrouvé à Marseille où elle coulait une retraite paisible et l’avons, comme PAPA Ayache, fêtée au rassemblement de l’A.B.E.O. Elle était très émue devant ces hommes et ces femmes qui n’avaient jamais oublié qu’ils avaient été SES élèves. Dans sa grande capeline et sous son élégant chapeau, elle avait goûté aux joies d’être connue et reconnue par toute la communauté de Bab El Oued.
D’autres souvenirs d’école habillent ma mémoire mais je les évoquerai sans tristesse dans d’autres « tchalefs » que je dédie à tous les « chitanes » d’Alger la blanche.

FIN



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