Des débuts très modestes
Au lendemain de la prise d’Alger et au début de la conquête les autorités ne se préoccupent que fort peu de la création d’établissements scolaires, les opérations militaires restant l’objectif principal.
La première école libre ouvre le 27 mai 1833 à Alger sur une décision du baron Voirol. D’abord située rue Socgemah, puis rue du Sagittaire, c’est un modeste établissement qui compte au plus une vingtaine d’écoliers, fils de fonctionnaires, de militaires ou de colons de la première heure. Quatre professeurs y apportent des rudiments de connaissances à des élèves plus ou moins studieux.
Mais le nombre d’élèves va se développer rapidement et l’humble école devient vite inadaptée. La recherche de nouveaux espaces devient nécessaire et c’est une maison mauresque de la rue des Trois couleurs qui est choisie. Les 115 élèves qu’elle abrite deux ans plus tard vont se trouver de nouveau très à l’étroit.
La Création du Lycée d’AlgerAu lendemain de la prise d’Alger et au début de la conquête les autorités ne se préoccupent que fort peu de la création d’établissements scolaires, les opérations militaires restant l’objectif principal.
La première école libre ouvre le 27 mai 1833 à Alger sur une décision du baron Voirol. D’abord située rue Socgemah, puis rue du Sagittaire, c’est un modeste établissement qui compte au plus une vingtaine d’écoliers, fils de fonctionnaires, de militaires ou de colons de la première heure. Quatre professeurs y apportent des rudiments de connaissances à des élèves plus ou moins studieux.
Mais le nombre d’élèves va se développer rapidement et l’humble école devient vite inadaptée. La recherche de nouveaux espaces devient nécessaire et c’est une maison mauresque de la rue des Trois couleurs qui est choisie. Les 115 élèves qu’elle abrite deux ans plus tard vont se trouver de nouveau très à l’étroit.
En 1840 l’humble école, devenue entretemps collège, se voit attribuer par le Gouverneur Général Damrémont une ancienne caserne de janissaires située à l’entrée de la rue Bab-Azoun. Cette caserne transformée en établissement d’enseignement par l’architecte Guiauchain, avait été construite par le Pacha Hassan pour renforcer les défenses d’Alger après l’attaque de Charles Quint.
Les dortoirs, longues salles sombres aux fenêtres grillagées, qui dominent une falaise battue par la mer sont particulièrement lugubres. Les classes des humanités ont été aménagées dans les anciennes écuries des janissaires.
L’Uniforme des collégiens
Pour conserver une apparence militaire à
l’établissement, un vieux tambour va être affecté au collège. Il est là
pour remplacer la frêle cloche qu’on entendait à peine. A l’heure des
cours il donne le signal de l’entrée ou de la sortie par un roulement
sonore, sous l’œil sévère des maîtres d’études, tandis que les élèves
défilent d’un air martial.
Les collégiens, qui dépendent encore de l’autorité militaire, portent un uniforme bleu roi avec une casquette et une capote à galons d’or. Les boutons sont gravés de l’inscription « Collège d’Alger » et un ceinturon à écusson doré complète la tenue.
C’est le 7 septembre 1848, dès la création de l’Académie d’Alger, que le collège va prendre l’appellation de Lycée.
Des conditions d’études de plus en plus précairesLes collégiens, qui dépendent encore de l’autorité militaire, portent un uniforme bleu roi avec une casquette et une capote à galons d’or. Les boutons sont gravés de l’inscription « Collège d’Alger » et un ceinturon à écusson doré complète la tenue.
C’est le 7 septembre 1848, dès la création de l’Académie d’Alger, que le collège va prendre l’appellation de Lycée.
En 1855, Napoléon III rend visite aux
500 élèves du Lycée. C’est l’apothéose. Après avoir crié « Vive
l’Empereur, vive l’Impératrice ! » ils se voient gratifiés d’un jour de
congé.
Mais le nombre d’élèves s’accroît toujours. En 1859 l’afflux est tel qu’il faut trouver un nouvel emplacement car les lycéens poursuivent leurs études dans des conditions très difficiles, malgré l’adjonction de locaux annexes situés dans une ancienne caserne d’artillerie.
Vers la construction d’un nouvel établissement
Mais le nombre d’élèves s’accroît toujours. En 1859 l’afflux est tel qu’il faut trouver un nouvel emplacement car les lycéens poursuivent leurs études dans des conditions très difficiles, malgré l’adjonction de locaux annexes situés dans une ancienne caserne d’artillerie.
Vers la construction d’un nouvel établissement
En février 1860, après de multiples
tergiversations, le site d’un nouveau lycée est choisi. Il sera situé au
delà des remparts de la Casbah à l’entrée du pauvre faubourg
Bab-El-Oued. C’est une vaste esplanade au sol inégal, couvert de
broussailles, de décombres, d’immondices et de
traces d’anciennes sépultures. Sur la partie sud on voit encore les
vieilles tombes des pachas et dans la partie basse, un vaste square.
C’est là que les condamnés militaires du Colonel Marengo y avaient aménagé en 1833 un jardin appelé « Jardin des condamnés » puis « Jardin Marengo ».
Plus bas encore s’élève le Fort Neuf, appelé aussi « Bordj El Zoubia » (fort des immondices). Il domine une petite crique où à l’époque turque on démolissait les bateaux provenant des prises. Devenu prison militaire en 1843 le bâtiment sera plus tard démoli pour faire place à la caserne Pélissier.
Cette zone longtemps inoccupée porte le nom de Place Bab-El-Oued. (plus tard Place Jean Mermoz). C’était le lieu où l’on érigeait la guillotine les jours d’exécution des condamnés à mort.
C’est sur cet emplacement de plus de 12.000m2 que sera érigé le nouveau lycée.C’est là que les condamnés militaires du Colonel Marengo y avaient aménagé en 1833 un jardin appelé « Jardin des condamnés » puis « Jardin Marengo ».
Plus bas encore s’élève le Fort Neuf, appelé aussi « Bordj El Zoubia » (fort des immondices). Il domine une petite crique où à l’époque turque on démolissait les bateaux provenant des prises. Devenu prison militaire en 1843 le bâtiment sera plus tard démoli pour faire place à la caserne Pélissier.
Cette zone longtemps inoccupée porte le nom de Place Bab-El-Oued. (plus tard Place Jean Mermoz). C’était le lieu où l’on érigeait la guillotine les jours d’exécution des condamnés à mort.
Il convient de noter au passage que le Maréchal Bugeaud s’opposa longtemps à la construction de l’établissement en ce lieu et Napoléon III visitant Alger en 1865, bien que les travaux fussent bien avancés, blâma lui aussi le choix de ce terrain.
Les architectes avaient vu grand. Le plan est ambitieux. Il s’agit de construire un bâtiment imposant, avec une façade à arcades grandiose et avec en son milieu un escalier monumental au haut duquel s’ouvre la grande porte.
Le monumental édifice sera composé de trois corps de bâtiments parallèles reliés par des galeries superposées sur deux niveaux, formant ainsi trois cours.
Un coût particulièrement élevé
De 1854 à 1864 de multiples
expropriations ont été nécessaires pour l’édification du lycée qui va
coûter très cher car, de plus, l’Etat a pris
possession
de l’établissement « sans réception préalable des travaux ». Sa mise
service va être assimilée par les juges à une « réception définitive
sans réserve ». Ce qui va permettre aux entreprises adjudicataires de
facturer tous les travaux complémentaires imprévus, allant jusqu’à
gagner un procès contre le maitre d’œuvre.
Les premiers travaux de déblaiement commencent le 10 décembre 1861, sur la base d’un descriptif détaillé et d’un quantitatif précis. Ce sont les entreprises Charles Martinelli et Pio Maselli qui ont remporté le marché. Les terrassements et la construction des bâtiments vont durer six années, de 1862 à 1868.
Dès les premiers coups de pioche des terrassiers, des souvenirs de l’occupation romaine vont apparaître. En juin 1863, à douze mètres de profondeur les ouvriers vont découvrir une chambre funéraire. Le révérend Berbrugger va y recueillir de la vaisselle en terre cuite de caractère artistique. Ce caveau antique sera longtemps conservé dans le sous-sol du Lycée.
L’inaugurationLes premiers travaux de déblaiement commencent le 10 décembre 1861, sur la base d’un descriptif détaillé et d’un quantitatif précis. Ce sont les entreprises Charles Martinelli et Pio Maselli qui ont remporté le marché. Les terrassements et la construction des bâtiments vont durer six années, de 1862 à 1868.
Dès les premiers coups de pioche des terrassiers, des souvenirs de l’occupation romaine vont apparaître. En juin 1863, à douze mètres de profondeur les ouvriers vont découvrir une chambre funéraire. Le révérend Berbrugger va y recueillir de la vaisselle en terre cuite de caractère artistique. Ce caveau antique sera longtemps conservé dans le sous-sol du Lycée.
Le lycée sera inauguré, puis mis
immédiatement en service en octobre 1868, tandis que les bâtiments de
l’ancien Lycée Bab-Azoun de plus en plus délabrés seront voués à la
démolition. Auparavant, le conservateur de la bibliothèque impériale, le
R.P. Bruckberger, avait pris la précaution de faire transporter au
Musée les inscriptions arabes qui s’y trouvaient, tandis que les
colonnes ciselées et les précieuses faïences serviront à décorer la
salle à manger du Palais d’Eté.
Un mot sur l’horloge que tous les anciens ont bien connue. Elle a été placée en septembre 1870 et a coûté 2 190 francs. Le son familier de sa cloche a marqué la vie de générations d’élèves depuis la création du lycée.
Dans la cour centrale s’ouvre, au deuxième étage la chapelle. Des centaines d’élèves y ont fait leur première communion. Au rez-de chaussée la salle de permanence accueille, sous l’autorité d’un appariteur placé sur une haute estrade, les élèves qui n’ont pas de cours.
Hommage aux morts de la Grande Guerre
C’est le 23 novembre 1922 que le Gouverneur Général Steeg va procéder à l’inauguration des tables de marbre érigées dans le parloir à la mémoire des 250 professeurs, surveillants, agents et élèves du lycée tombés au Champ d’Honneur pendant le guerre 1914-18.
Par les soins de l’association des anciens élèves, organisatrice de la cérémonie, deux palmes de bronze vont décorer ces tables du souvenir, œuvre des architectes Petit et Garnier.
Le bombardementUn mot sur l’horloge que tous les anciens ont bien connue. Elle a été placée en septembre 1870 et a coûté 2 190 francs. Le son familier de sa cloche a marqué la vie de générations d’élèves depuis la création du lycée.
Dans la cour centrale s’ouvre, au deuxième étage la chapelle. Des centaines d’élèves y ont fait leur première communion. Au rez-de chaussée la salle de permanence accueille, sous l’autorité d’un appariteur placé sur une haute estrade, les élèves qui n’ont pas de cours.
Hommage aux morts de la Grande Guerre
C’est le 23 novembre 1922 que le Gouverneur Général Steeg va procéder à l’inauguration des tables de marbre érigées dans le parloir à la mémoire des 250 professeurs, surveillants, agents et élèves du lycée tombés au Champ d’Honneur pendant le guerre 1914-18.
Par les soins de l’association des anciens élèves, organisatrice de la cérémonie, deux palmes de bronze vont décorer ces tables du souvenir, œuvre des architectes Petit et Garnier.
Le 24 novembre 1942 le Lycée d’Alger est
la cible d’un bombardement par un avion isolé de la Luftwaffe. Deux
bombes vont atteindre l’aile droite de la façade principale, entraînant
la mort du proviseur Lalande et de sa petite fille adoptive alors qu’ils
étaient réfugiés dans une cave. Le censeur, son épouse et leurs deux
enfants vont également périr au cours de ce raid tragique.
Après le bombardement, les cours ne purent reprendre. Le lycée fut alors occupé par les Anglais. Les élèves furent envoyés pour certains à l’école de la rue Lazerges et pour d’autres à celles de la rue du Soudan et de la rue Rochambeau.
Les cours reprirent normalement en 1945/46.
Le Grand Lycée d’Alger devient Lycée BugeaudAprès le bombardement, les cours ne purent reprendre. Le lycée fut alors occupé par les Anglais. Les élèves furent envoyés pour certains à l’école de la rue Lazerges et pour d’autres à celles de la rue du Soudan et de la rue Rochambeau.
Les cours reprirent normalement en 1945/46.
Pourquoi Grand Lycée d’Alger et non Lycée Bugeaud ?
Selon Bernard Ducongé, de la « Taupe arabe », l’appellation « Lycée Bugeaud » apparaît aux alentours des années 1942. On manque de
précisions sur ce qui a motivé ce changement de nom.
Jusqu’en 1962, le Lycée Bugeaud va conserver le quasi-monopole de l’enseignement classique et surtout la formation des élites dans les classes préparatoires aux grandes écoles scientifiques (la Taupe), littéraires (Khâgne), économiques (Agro), militaires (Saint Cyr, La Corniche).
Quelques élèves prestigieux
Charles de Galland (1851-1923) professeur de lettres puis maire d’Alger. Alphonse Juin (1888-1967) Maréchal de France. Pierre Benoit, académicien, Louis Gentil de l’Académie des sciences. Jules Carde Gouverneur Général de l’Algérie de 1930 à 1935.
Des professeurs et des élèves devenus célèbresSelon Bernard Ducongé, de la « Taupe arabe », l’appellation « Lycée Bugeaud » apparaît aux alentours des années 1942. On manque de
Jusqu’en 1962, le Lycée Bugeaud va conserver le quasi-monopole de l’enseignement classique et surtout la formation des élites dans les classes préparatoires aux grandes écoles scientifiques (la Taupe), littéraires (Khâgne), économiques (Agro), militaires (Saint Cyr, La Corniche).
Quelques élèves prestigieux
Charles de Galland (1851-1923) professeur de lettres puis maire d’Alger. Alphonse Juin (1888-1967) Maréchal de France. Pierre Benoit, académicien, Louis Gentil de l’Académie des sciences. Jules Carde Gouverneur Général de l’Algérie de 1930 à 1935.
Fernand Braudel, Yves Lacoste, André
Grec, Georges Aymé, physicien et océanographe spécialiste de la
Méditerranée, Masqueray, Maurice Wahl, Louis Bertrand, Jules Lemaître,
Jean Grenier y ont enseigné. Mohand Idir Aït Amrane, Dalil Boubakeur,
Jacques Derrida, Alain Vircondelet, Roger Hanin, Mouloud Mameri, Paul
Charles Robert (dictionnaire) y ont étudié. Ainsi que deux prix Nobel :
Albert Camus et Claude Cohen Tannoudji.
La liste paraît inépuisable.
La liste paraît inépuisable.
L’association des anciens Elèves
Dès 1859, une association des anciens
élèves s’est constituée. Elle organisera de nombreuses manifestations
culturelles, littéraires, théâtrales et commémoratives, des expositions
et des bals.
Après l’Indépendance s’est créée une association des anciens élèves du Lycée Bugeaud.(Voir le site Bernard Venis : Lycée Bugeaud).
Présentation de l’A.T.A. (les Amis de la Taupe Arabe)
Par Charles Pompéi Président
« Très tôt après l’arrivée des Français en 1830, les autorités eurent pour souci de créer sur place des classes d’enseignement supérieur pour éviter que les étudiants aient à « s’exiler » en métropole, vue les conditions difficiles des voyages en cette époque. En 1873, il est déjà fait mention d’une classe de « spéciales » et de classes préparatoires à Saint Cyr et Navale en 1886 et 1889. Ces classes firent partie intégrante du Lycée jusqu’en juin 1962.
C’est sans doute dans les années trente que la désignation familière de « Taupe Arabe » fut attribuée aux classes de mathématiques supérieures et spéciales par les élèves eux-mêmes, pour se différencier de leurs homologues métropolitains avec lesquels s’était établie une
Après la seconde guerre mondiale et jusqu’en 1962, la « Taupe Arabe » resta parmi une des meilleures écoles de France osant disputer certaines années, à de grands lycées parisiens ou à Sainte Geneviève à Versailles, les meilleurs taux de réussite à Polytechnique et Normale Supérieure.
Grâce à des professeurs dévoués, l’apport de ces élèves aux Académies, Instituts Savants dans la recherche et l’enseignement supérieur, tout comme les industries et le nucléaire notamment ne peut être passé sous silence ».
On peut retrouver mention de ces résultats dans les archives des Grandes Écoles, et dans le remarquable ouvrage de René Mayer, ancien élève : « Le Dictionnaire biographique des Français d’Afrique du Nord ».
Parmi les plus éminents on compte Claude Cohen-Tannoudji, Prix Nobel de Physique en 1997.
Albert Camus est là pour rappeler que l’enseignement des lettres à Bugeaud n’avait rien à envier aux disciplines scientifiques. Une forte proportion des élèves venait des autres lycées d’Afrique du Nord. Ils étaient pensionnaires et vivaient en groupes soudés. Les jeunes filles n’y étaient pas rares à une époque où les « Grandes Écoles » étaient plutôt misogynes ! Certaines ont mené une grande carrière, en particulier dans l’enseignement.
Profondément marqués dans les années 1950 par la personnalité du professeur principal, le mathématicien Marcel Saint-Jean, les anciens élèves ont fondé en 1985 une association, l’A.T.A. qui reste aujourd’hui très active en dépassant leur naturelle nostalgie des années passées pour maintenir et développer des liens culturels, scientifiques ou tout simplement amicaux entre les survivants des classes de Mathématiques Supérieures et Spéciales du Lycée Bugeaud. L’A.T.A. s’est ouverte par cooptation à d’anciens élèves d’autres classes préparatoires de l’enseignement supérieur d’Algérie jusqu’en 1962. »
Gérard SEGUY
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