Les cinémas
de notre enfance sont restés gravés dans nos mémoires endolories
Nous autres, les
enfants nous aimions les westerns appelés communément « film de
cow-boy », où les chevauchées et les bagarres au saloon étaient
obligatoires et monnaie courante.
Devant les entrées de cinéma, se
tenait le « 5/25 », le casino du pauvre, contre lequel on tentait
de gagner de quoi se payer une place .
Le cinémascope faisait son
apparition avec " CAPITAINE KING" un film avec Tyrone Power
. Pour la circonstance, le Marignan avait étrenné son immense
écran. Je me souviens du murmure (doux éphémisme pour un peuple
dont le verbe haut était l'un des signes distinctifs) qui accompagna
l'ouverture du rideau jaune.
A cette époque, l’accès aux
salles ne se faisait qu’après avoir montré patte blanche et
prouvé que l’on avait atteint l’âge canonique de seize ans pour
les films de Martine Carol (LUCRECE BORGIA) ou Brigitte Bardot ( EN
EFFEUILLANT LA MARGUERITE et ET DIEU CREA LA FEMME).
Les billets étaient numérotés et
malheur à celui qui voulait changer de place. Après avoir fait la
"chaîne", la caissière nous délivrait nos billets en
n'omettant pas de marquer de son crayon gras (d'une croix rouge ou
bleue) la place réservée sur le plan du cinéma . L’ouvreuse nous
installait alors dans notre siège numéroté sans oublier de tendre
immanquablement la main pour recevoir une petite pièce (ou un doigt
d’un " chitane" qui se faisait aussitôt traiter de
"p'tit voyou") .
Pendant la pause, entre la première
partie ( souvent un documentaire qui nous barbait ou un dessin animé
qui nous ravissait) et le « grand » film, le « gousto » d'acheter
des « Coeurs Glacés" présentés par l’ouvreuse nous mettait
l'eau à la bouche mais "macache l'argent", alors on
faisait "tintin". Nous aimions l’entracte qui nous
permettait de faire un clin d'oeil au petit négro d'Afric-Film (13
rue auber, Alger 628-28 et 628-29), de se délecter des réclames,
ancêtres des publicités et de s'adonner au chahut car on savait
qu'il nous fallait respecter le silence quand le film commençerait.
Le retardataire était conduit dans
l’obscurité de la salle par l’ouvreuse. On ne distinguait que le
rond lumineux de sa lampe de poche dirigée vers le sol sous les
remontrances des adultes qui ne désiraient pas etre dérangés
Que ce soit dans la variété, les
galas de boxe ou de catch, le théâtre ou encore le cinéma, le
Majestic
rue Borély la Sapie,était la salle la plus prestigieuse de Bab El
Oued et la plus vaste d'Afrique du Nord.
La grande salle du
Marignan,
sur l’avenue Durando, Le Variétés,
rue Eugéne Robe, le Plaza rue du Général Verneau, le
Suffren, le Lynx
ex-Bijou
rue Rosetti, le Trianon
avenue de la Bouzaréah transformé en Monoprix (modernisme oblige !)
le Rialto
à la basseta, le Palace
et le Mon Ciné
de la rue Rochambeau autant de cinémas qui nous ont laissés des
tendres souvenirs; Noublions pas les acteurs et actrices du passé :
Jeff Chandler, Randolph Scott, Audie Murphy, James Cagney, Deborah
Kerr, les Trois Stooges, Jean Simons, Roy Rogers, Dean Martin et
Jerry Lewis and so on..........(je pourrais écrire un livre avec les
artistes qui ont bercé notre enfance)
Nous étions amoureux
(les jeunes d'aujourd'hui diraient "fan") du cinema
americain mais également des films italiens (Rossana Podesta, Toto,
Alberto Sordi, Silvana Mangano, Robertino, Silvana Pampanini, Amédéo
Nazzari et consorts, des films hispaniques avec l'enfant à la voix
d'or , Joselito qui électrisait le public feminin ainsi que les
films de Luis Mariano et Carmen Sevilla, le couple préféré des
pieds noirs et Sarita Montiel.
Nous ne nous privions
cependant pas des films francais (Fernandel se taillant la part du
lion avec la série des Don Camillo, une farce où tous les pieds
noirs se retrouvaient.) Mais PLEIN SOLEIL, SAINT TROPEZ BLUES, LES
TRICHEURS, LES COUSINS et FAIBLES FEMMES annonçaient déjà les
films "nouvelle vague" des CHABROL, MALLE, TRUFFAUT et
GODARD. ( ah, ce film de Godard avec Belmondo, Brialy et Anna Karina
"UNE FEMME EST UNE FEMME" ). Les "Variétés" ne
dut qu'à l'amour des algérois pour "leur" cinéma de ne
pas être mis à sac tant la colère fut omniprésente. En effet, le
"chef d'oeuvre" de Godard fut le plus grand navet du cinéma
français que Bab El Oued connut.
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