L'enfance de Léon Juda
Le grand maitre des lieux, le Rabbin Abner Ben DAVID lui enseigna la lecture, l'écriture, les mathématiques et la "Thora".
Léon Juda s'était, alors, révélé un élève appliqué, l'esprit toujours en éveil à la grande satisfaction de son professeur
--"Tu es l'héritier d'une belle dynastie religieuse! N'oublies jamais que tu es un DURAN et le nom que tu portes, celui de ton père, de ton grand-père, de tes aieux et de "RASHBAZ", tu te dois de les honorer tous les jours dont l'Eternel te fait grâce."
Parrallèlement à ses études générales, Léon Juda s'était vu prodiguer, par son père, l'enseignement du commerce et des transactions financières.
Doté d'un pouvoir de compréhension et d'assimilation remarquables, l'enfant avait emmagasiné le savoir avec une facilité déconcertante.
Après sa "Bar Misvah" qui illumina la "djenan" familiale dans un concert pathétique et grandiloquent de you-you, d'embrassades, de musique orientale, de prières et de louanges à l'Eternel, de rires de joie et de chants judéo-andalous, Léon Juda se coucha, la tête bouillonnante d'images de la dernière étape d'une enfance en partance pour le délicieux pays du souvenir et de la nostalgie.
Les "teffilins", ces lanières de cuir noir ou brun qui, tel le tourbillon de la vie, s'enroulèrent autour de son bras et de sa tête, la lecture d'un verset de la "Thora" sur la "Tebbah", guidée par la plume d'oie du "Rabbin", le regard humide de son père lorsqu'il lui posa, avec des gestes empreints de solennité, le "taleth" qui lui ouvrait la porte du monde adulte selon la loi de MOÏSE.
Adieu les courses vagabondes dans la magnifique campagne d'EL DJEZAIR, les promenades insouciantes à dos de brêles, meilleur moyen de locomotion pour escalader les collines où se détachaient les quatre monumentaux aqueducs de style romain qui alimentaient les fontaines de la ville. Aqueducs au parcours souterrain qui enjambaient les ravins et couraient d'arche en arche, bâtis au XVIème siècle pour celui du TELEMNY qui débouchait à BAB DJEDID, au XVIIème siècle pour celui de BIRTRARIA qui alimentait le FRAIS VALLON à BAB EL OUED et pour celui du HAMMA qui rafraichissait BAB AZOUN, enfin, au XVIIIème siècle pour celui de l'AÏN ZEBOUDJA qui désaltérait le centre ville.
Adieu les belles histoires de la petite mémée, mélanges de contes et légendes andalous, de mysticisme et de superstition orientale, de héros bibliques et de sagesse millénaire.
Adieu les escapades autorisées par son père dans les ruelles tortueuses et mal odorantes de la vieille cité qu'une imagination débordante maquillait en coupe-gorge.
Adieu les câlins de la petite mémée et l'indulgence de sa mère, l'amour de sa vie. Adieu le monde du rêve. Adieu l'enfance! Bonjour l'adolescence!
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