UNE COULEUR PAR OUVRAGE (pour faciliter la lecture de mes livres)
Mon oncle Maurice, c’est un fantaisiste. Il a fait tous les métiers. Y s’est marié plusieurs fois et comme il est important à l’opéra d’Alger, ses maîtresses, il arrive même pas à les compter. Mon oncle, il a la folie des grandeurs. Avoir une voiture ça lui suffit pas. Il les achète par deux. Et pas n’importe quelle marque, seulement des américaines. Des Studbakers, des Tuckers, des Impalas, tu en voulais, toi ? Mais ce qui nous a le plus surpris, c’est l’achat d’un Groendahl, un berger belge noir de la gueule aux pattes. Encore, s’il en avait besoin pour garder sa villa ou son atelier de confection rue Cavelier de la Salle. Aouah, c’est une lubie comme une autre qui lui passera avant que ça nous reprenne.
Ma tante, toujours elle dit que je lui ressemble mais, mes amis, y me comparent plutôt à Jerry Lewis.
Nicole elle prend ma défense et elle est catégorique :
–Tu ressembles à Anthony Perkins et à personne d’autre !
Même pas à moi, je ressemble !
Blaky, y nous obéit au doigt et à l’œil à mes frères et à moi. Quand je le promène dans le quartier, je fais le vide autour de moi. La rouf, je vous dis pas. Total, blaky il est gentil comme tout mais les amis y préfèrent penser que "gentil n’a qu’un œil."
Quand je le descends en bas la rue ou au jardin, je fais le vide autour de moi. Mani, y préfère voir mon chien de loin. J’ai beau le rassurer mais il a créé, avec Bouzouz, le club des trouillards du Far West. Pour ceux qui connaissent que dalle en cinéma, Jerry Lewis et Dean Martin, y sont les vedettes du film « Le trouillard du Far West ! Alors, pour que les joues de mes amis elles reprennent des couleurs, j’abandonne Blaky à mes frères qui vont pouvoir rouler des mécaniques.
Un autre de mes oncles, il avait une salle de ping-foot avenue Durando, face au cinéma « le Marignan ». Dans cette salle où les amateurs y se disputaient le titre suprême de champion du monde et des alentours de ping-foot, mon oncle, fin commerçant, y vendait également toutes sortes de bonbons aux enfants qui s’y pressaient à la sortie du cinéma. Et parmi ces bonbons, les chewing gums. Une marque qui faisait concurrence à Globo, elle avait une particularité qui faisait son succès : les chewing-gums étaient de couleur différente sous leur emballage gris. La gomme rose donnait droit à zbouba mais la couleur jaune gagnait un chewing gum supplémentaire gratuit.
Malheureusement, des gommes jaunes, y en avait plus bezef dans la boite où étaient rangés les chewing-gums. Pour la bonne raison que, dans son infinie bonté et coupable malhonnêteté, mon oncle, y retirait toutes les gommes jaunes de la boîte. Pour la forme, il en laissait une seule. Zarmah, y se dédouanait de sa tricherie. Alors obligé les clients, jamais y gagnaient. Par contre, nous autres, ses neveux, on mâchait toujours des chewing- gums jaunes au grand étonnement des copains. La vérité, on pouvait pas avouer que notre tonton chéri, c’était un gredin! Et le respect alors !
Dire que Bouzouz, il a pas été troublé par la chance insolente des enfants de la famille, ce serait un mensonge éhonté ainsi que pure spéculation (Purée, la classe du narrateur !) mais les preuves de la tricherie, elles sont restées un mystère pour la plupart des copains. Je suis resté blanc comme neige mais la vérité, la honte à la figure, je sais ce que c’est. Je rasais pas les murs mais presque. Je m’en suis tiré en avouant à mes amis, et seulement à mes amis, la roublardise de mon oncle ! L’honneur était sauf !
Mais des roublards, y en avait aussi chez les enfants. Qui c’est qui a pas essayé de resquiller dans un cinéma ou de taper un illustré chez Palomba, le libraire d’occasion de la rue Montaigne ? Qui c’est qui levait pas le flipper à la Grande Brasserie pour gagner des parties sans faire tilt ou qui rembourrait pas les buts des ping-foot afin que les boules ne tombant pas, on éternisait les parties. Et qui rentrait à huit chitanes chez Doudou le « moutchou » du jardin Guillemin pour acheter des bonbons et en tapait une douzaine? Comme elles disaient nos mères, on était des salopris mais quand même, quand même, elles nous pardonnaient tout. Sauf une fois quand Bouzouz il a mordu dans le camembert que Mani y venait d’acheter pour son père. Bouzouz, des fois y disjonctait. Raïeb, Mani il est resté tout babao avec son camembert à moitié mangé ! Nous autres, morts de rire, on mesurait pas la portée de cet outrage es-camembert. Mani, y rigolait tout en pleurant. Comment faire comprendre ce crime de lèse majesté envers son père ? Et le respect alors ! Mani, au bord du suicide, il était ! La vérité, on a eu de la peine alors, on s’est tous cotisé et Doudou, y nous a vendu un deuxième camembert. Papa Mani, il a eu son Toukrem et son fils, il a partagé avec ses amis, le reste du premier camembert.
Le lendemain, on prend l’autobus pour aller au cabanon de Capo. Le wattman y nous empêche de resquiller alors, on descend à Pointe Pescade et on termine le chemin à pied. Les Horizons Bleus, Bains Romains et Baïnem y sont vite avalés tellement l’envie de revoir Capo et de taper une pancha elles sont fortes. Quand on arrive au cabanon, on comprend qu’on s’est fait du mauvais sang pour rien. Nos mères, elles ont dû nous jeter un sort pour qu’on leur ressemble à ce point. Capo, ce bâtard, y se pavane sur la plage au milieu d’une kyrielle de filles. Alors, pendant que nous on se faisait un sang d’encre (là j’exagère, mais c’est pour dire !) lui, tranquille, y se la coule douce, style le tombeur de ces dames. Quand même, il est content de nous voir même si la honte elle lui mange la figure avec ses amis traîne-savate qui se ramènent de Bab El Oued. Avec nous, y perd aussitôt son aura de grand blessé de la route. On lui laisse pas en placer une mais, on dirait que sa bonne humeur elle revient au triple galop. Même sa banane, elle reprend des couleurs. La journée, elle passe comme un avion à réaction. On est rassurés, notre Capo il est toujours le même et on le retrouvera à la rentrée tel qu’en lui même.
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A SUIVRE..........
A SUIVRE..........
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